Aller au contenu

Partie 11 - Gestion/vente/occupation de l’indivision successorale

Gestion de l'indivision successorale

Comment gérer les biens de l’indivision ?

Le budget de l’indivision successorale

Les revenus de l’indivision

Détermination des revenus et fruits de l’indivision

Les revenus de l’indivision (ou « fruits ») sont issus des biens dépendant de l’indivision successorale. Il peut s’agir : 

  • de loyers issus de la location d’un bien indivis ;
  • de revenus issus de parts sociales ou d’actions indivises ;
  • de l’indemnité d’occupation due par un indivisaire occupant un bien immobilier indivis.
Intégration des revenus et fruits à la masse successorale indivise

Les fruits de l’indivision viennent accroître la masse indivise à partager conformément à l’article 825 du Code civil.

« La masse partageable comprend les biens existant à l’ouverture de la succession, ou ceux qui leur ont été subrogés, et dont le défunt n’a pas disposé à cause de mort, ainsi que les fruits y afférents.

Elle est augmentée des valeurs soumises à rapport ou à réduction, ainsi que des dettes des copartageants envers le défunt ou envers l’indivision ».

Sort des revenus et fruits indivis

Les fruits intégrant la masse successorale indivise peuvent :

  • être laissés sur un compte au nom de l’indivision (chez le Notaire ou au sein d’un établissement bancaire) sans que les héritiers et ayants droits ne les perçoivent directement ;
  • être partagés directement entre les indivisaires en cas d’accord entre eux.

A défaut d’accord entre les indivisaires pour un partage des fruits, une demande en justice peut être initiée. L’article 815-10 du Code civil prévoit spécifiquement dans un article d’application efficace que « chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis ».

« Sont de plein droit indivis, par l’effet d’une subrogation réelle, les créances et indemnités qui remplacent des biens indivis, ainsi que les biens acquis, avec le consentement de l’ensemble des indivisaires, en emploi ou remploi des biens indivis.

Les fruits et les revenus des biens indivis accroissent à l’indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise ».

Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être.

Chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes proportionnellement à ses droits dans l’indivision ».

Délai pour réclamer les fruits et revenus dus à l’indivision

L’article 815-10 du Code civil dispose que la recherche des fruits et des revenus de l’indivision ne sont pas recevables plus de 5 ans « après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être »

C’est la raison pour laquelle, dans le cadre de l’occupation d’un bien dépendant de la succession par un héritier indivisaire, ses cohéritiers devront veiller à formuler dans ce délai de 5 ans une demande d’indemnité au titre de son occupation. A titre d’illustration, une demande formulée après un délai de 7 ans permettrait à l’indivisaire occupant de ne pas être redevable d’une indemnité d’occupation pour les deux premières années de son occupation. Seules les 5 années précédant la demande pourront être réclamées.

Bon à savoir : Le délai de prescription de cinq ans peut être conventionnellement allongé ou écarté (Cass. Civ. 1ère, 4 octobre 2005, no 03-19459).
Bon à savoir : les indemnités d’occupation qui n’auront pas été réclamés ou obtenus auprès de l’indivisaire occupant pourront faire l’objet d’une requalification en donation à son bénéfice qui devra être rapporté à la succession.
En savoir plus sur le rapport des donations

Le paiement des charges indivises

Le paiement des charges indivises incombe par principe à l’indivision successorale et donc à tous les indivisaires, en fonction de leur quote-part dans l’indivision

Dans un cadre successoral, il sera fréquent que le Notaire soit autorisé à rapatrier les liquidités bancaires du défunt sur un compte en son étude pour lui permettre d’assurer le paiement des charges indivises (taxe foncière des biens, coût des actes liés à la succession, etc.). 

En l’absence de fonds indivis suffisants, les indivisaires sont tenus de régler eux-mêmes les charges indivises. Il est également possible que le paiement soit demandé à l’un seul d’entre eux à charge pour lui d’en obtenir le remboursement par ses coindivisaires.

Afin de faire face au paiement des charges, les indivisaires à la majorité des 2/3 des droits indivis peuvent vendre des meubles indivis conformément à l’article 815-13 du Code civil. 

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Bon à savoir : en cas d’occupation d’un bien par un héritier, les charges liées à l’occupation du bien lui incombent exclusivement à l’exception de la taxe d’habitation (qui est devenu une charge de l’indivision depuis un revirement remarqué de la Cour de Cassation, Civ. 1ère, 5 décembre 2018, n°17-31189), alors qu’elles seraient assumées par l’indivision entière si le bien était libre de toute occupation. Dans une telle hypothèse, si l’indivision vient à régler des frais que l’héritier occupant aurait dû assumer seul, ce dernier sera redevable d’une créance à l’égard de l’indivision.  

Les comptes d’administration entre indivisaires

Lorsque l’indivision règle une charge incombant à un seul indivisaire (par exemple les factures d’électricité de l’indivisaire occupant seul un bien indivis) ou inversement lorsqu’un indivisaire règle des frais incombant à l’ensemble des héritiers indivisaires (taxe foncière, charges de copropriété non récupérables etc.), des comptes d’administration se créent.

Ainsi l’indivisaire qui avance le règlement d’une charge incombant à la succession pourra faire valoir une créance pour n’assumer qu’au final sa quote-part. Selon le type de dépenses (de conservation, d’amélioration, etc.), l’indivisaire devra prendre soin de recueillir l’accord de certains ou de tous les indivisaires pour faciliter son remboursement.

Les comptes d’administration sont soldés par compensation dans le cadre du partage de la succession. Si ces comptes ne se compensent pas, un solde créditeur est versé à celui des indivisaires ou de l’indivision qui a plus payé.

Les règles légales de l’entretien des biens indivis

La conservation des biens indivis

Pouvoir d’un seul indivisaire pour accomplir les actes conservatoires

Chaque indivisaire, seul, sans autorisation de ses coïndivisaires ou du juge, possède le pouvoir d’accomplir les actes nécessaires à la conservation du bien indivis.
Il s’agit de la seule catégorie de gestion individuelle du bien indivis : un seul des indivisaires, quelle que soit la quote-part de propriété qu’il détient peut prendre tout acte de conservation même si l’acte n’est pas urgent.

Définition des actes conservatoires

La typologie des actes de conservation d’un bien indivis est prévue par l’article 815-2 du Code civil. 

« Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.

Il peut employer à cet effet les fonds de l’indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers.

A défaut de fonds de l’indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.

Lorsque des biens indivis sont grevés d’un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l’usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations ».

Les actes concernés peuvent être matériels ou juridiques, de nature et de degrés très divers. Il est difficile -et limitant- de vouloir en faire une liste exhaustive. Il est préférable d’en comprendre la logique pour l’appliquer à toutes les situations possibles. Ainsi, la jurisprudence considère en règle générale que les actes réalisés lorsque le bien est en péril dans son intégrité ou pour conserver sa valeur représentent des actes conservatoires si l’action envisagée ne compromet pas les droits des autres indivisaires. 

Sont ainsi considérés comme des actes conservatoires : 

  • le paiement de la taxe foncière (Cass. Civ. 1ère 13 janvier 2016 n°14-247267) ainsi que le paiement de la taxe d’habitation (Cass. Civ. 1ère, 5 décembre 2018 n° 17-31189)   ;
  • l’action engagée tendant à l’expulsion d’occupants sans droit ni titre et au paiement d’une indemnité d’occupation (Cass. Civ, 1ère 4 juillet 2012, n° 10-21967) ;
  • l’action en revendication d’une servitude de passage (Cass. Civ, 3ème, 4 déc. 1991, n° 89-1.989) ;
  • la déclaration d’une créance déclarer une créance de l’indivision à la procédure collective du débiteur de l’indivision (Cass. Com. 11 juin 2003, n° 00-11913).
Financement des actes de conservation

Pour financer ces actes d’administration, l’alinéa 2 de l’article 815-2 du Code civil permet à l’indivisaire d’utiliser les fonds de l’indivision. Il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers. Il s’agit d’une présomption de pouvoir qui garantit au tiers de bonne foi de pouvoir contracter avec un indivisaire en toute sécurité juridique. 

Si l’indivision ne dispose pas de fonds, l’indivisaire peut en faire l’avance puis obliger ses coindivisaires à contribuer à la dépense avec lui en lui remboursant.

« Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.

Il peut employer à cet effet les fonds de l’indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers.

A défaut de fonds de l’indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.

Lorsque des biens indivis sont grevés d’un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l’usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations ».

L’administration des biens indivis

Majorité des deux tiers des droits indivis

Depuis la réforme du 23 juin 2006, les actes d’administration peuvent être effectués à la majorité des deux tiers des indivisaires selon l’article 815-3 1° du code civil. 

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Il s’agit donc d’une gestion majoritaire uniquement liée aux quotes-parts indivises et non au nombre d’indivisaires. Un indivisaire qui détiendrait 2/3 des droits de l’indivision peut décider seul de ces actes. 

Tous les autres actes qui ne sont ni conservatoires, ni d’administration nécessitent l’unanimité de tous les indivisaires. 

Détermination des actes d’administration

Sont considérés comme des actes d’administration :

  • l’action en bornage (Cass. Civ. 3ème, 12 avril 2018, n° 16-24556) ;
  • l’action en résiliation d’un bail rural (Cass. Civ. 3ème, 29 juin 2011, n° 09-70894).

L’article 815-3 du Code civil dresse également la liste suivante :

  • le mandat général d’administration donné à un indivisaire ou à un tiers pour gérer l’indivision ;
En savoir plus sur l'administration d'une succession par un tiers
  • la vente des meubles indivis pour payer les charges et dettes de l’indivision comme vu précédemment ;
  • la conclusion et le renouvellement des baux autres qu’agricoles, commerciaux, industriels ou artisanaux. La Cour de cassation a récemment réaffirmé que la conclusion d’un bail rural requiert effectivement l’unanimité des indivisaires (3ème civile, 26 janvier 2017, n°14-29.272).

La liste ainsi fixée n’est pas limitative. La loi a prévu une règle ou plus exactement une limite d’ordre général aux possibilités d’administrer un bien indivis à la « seule majorité de deux tiers » : le consentement de tous les indivisaires redevient nécessaire pour conclure un acte qui ne ressort pas de « l’exploitation normale des biens indivis ». L’exploitation normale doit correspondre à une gestion qui ne compromet pas la substance des biens et qui assure leur bon maintien dans le patrimoine. 

Bon à savoir : dans tous les cas, l’alinéa 2 de l’article 815-3 du Code civil précise que les indivisaires qui effectuent un acte d’administration sur un bien indivis sont tenus d’en informer les autres sous peine d’inopposabilité de l’acte à leurs égards. 

Cette inopposabilité peut avoir plusieurs conséquences. La principale d’entre elles est l’impossibilité dans laquelle peut se trouver l’indivisaire qui a engagé les frais de se faire rembourser par les autres membres de l’indivision.

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

L’amélioration des biens indivis

Travaux d’amélioration des biens
Nature des travaux d’amélioration d’un bien indivis

Les travaux d’amélioration d’un bien en indivision sont ceux qui lui apportent une plus-value.

Cette plus-value qui résulte de l’amélioration d’un bien appartient à l’indivision et pas au seul indivisaire qui en a pris l’initiative. Si ce dernier a engagé des frais, il a droit à un remboursement, a priori calqué sur l’augmentation de valeur que le bien connaît, cette plus-value devant être évaluée au temps du partage ou de l’aliénation du bien.

Pour déterminer si des travaux ont amélioré le bien, le critère selon lequel les dépenses auraient été faites dans l’intérêt des indivisaires ou d’un seul n’est pas considéré (Cass. Civ. 1ère, 29 novembre 1994, n°92-21151). En effet, les juges du fond doivent rechercher si les dépenses effectuées ont augmenté la valeur du bien pour justifier une créance à ce titre.

« Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.

Inversement, l’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute ».

Autorisation des travaux d’amélioration d’un bien indivis

Les travaux d’amélioration d’un bien indivis peuvent être engagés dans plusieurs circonstances :

  • en cas d’urgence, ils pourront être engagés par un seul indivisaire à titre conservatoire (sur le fondement de l’article 815-2 du code civil) ;
  • à la majorité des deux tiers (sur le fondement de l’article 815-13 du code civil) si les travaux peuvent être qualifiés d’actes d’administration ;
  • évidemment par l’ensemble des indivisaires en cas d’accord. 

« Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.

Il peut employer à cet effet les fonds de l’indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers.

A défaut de fonds de l’indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.

Lorsque des biens indivis sont grevés d’un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l’usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations ».

Remboursement des travaux d’amélioration engagés par un seul indivisaire

La demande de remboursement de l’héritier indivisaire qui aurait financé seul des travaux d’amélioration entre dans le cadre général des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision successorale.

Contrairement aux dépenses de conservation, remboursées à l’euro près dans le cadre de la liquidation, les dépenses d’amélioration bénéficient de la plus-value qu’elles ont générées. C’est ainsi qu’elles sont remboursées en tenant compte de la valeur prise par le bien. Le mode de calcul nécessite un travail de fiction par l’expert immobilier puisqu’il doit évaluer le bien soumis à l’indivision comme si les travaux n’avaient pas eu lieu puis en l’état après les travaux. L’objectif est que l’indivisaire qui a financé ces améliorations soit associé à la plus-value engendrée. 

Bon à savoir : dans le calcul de l’indemnité qui sera versée à l’indivisaire ayant réalisé les travaux, l’article 815-13 du Code civil intègre la notion rare d’équité qui permet ainsi au juge de fixer l’indemnité due à l’indivisaire qui a financé selon une appréciation souveraine : il n’est ainsi ni tenu ni par le montant de la dépense faite ni par celui de la plus-value réalisée.

« Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.

Inversement, l’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute ».

Cas spécifique de la construction sur un terrain indivis

Une construction ne peut normalement être élevée sur un terrain indivis qu’avec l’accord de tous les indivisaires. Si un indivisaire construit sans le consentement des autres, ces derniers peuvent exiger la démolition et le rétablissement du bien dans son état avant la construction sans attendre le partage. Les frais de démolition incombent à l’indivisaire constructeur. 

Les coindivisaires du constructeur bénéficient d’une autre option. En effet s’ils préfèrent, ils peuvent devenir propriétaires des biens. En vertu de la théorie civile de l’accession (article 551 du Code civil), les constructions construites sur un terrain indivis deviennent indivises.

« Tout ce qui s’unit et s’incorpore à la chose appartient au propriétaire, suivant les règles qui seront ci-après établies ».

Dans cette hypothèse, l’indivisaire constructeur pourra solliciter une créance pour les frais de construction engagés. 

Il est donc risqué de faire établir une construction sur un terrain indivis, sans l’accord des indivisaires puisque le simple fait d’avoir financé la construction ne garantit pas à l’indivisaire concerné l’attribution du terrain et sa construction à son bénéfice. 

La dégradation des biens indivis

En cas de dommage ou de dégradation d’un bien indivis, tous les indivisaires sont en principe responsables. 
Il est toutefois prévu par la loi que si une dégradation ou une détérioration – diminuant la valeur du bien – a été commise du fait ou par la faute d’un indivisaire, ce dernier doit en répondre et les assumer seul (article 815-13 du Code civil).

« Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.

Inversement, l’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute ».

La possibilité de régler conventionnellement la gestion de l’indivision : la convention d’indivision

En parallèle des règles légales relatives au régime de l’indivision, les indivisaires peuvent décider d’établir et de conclure une « convention d’indivision » ou « contrat d’indivision » régissant l’exercice de leurs droits indivis, du fonctionnement de l’indivision, etc. 

Unanimité des indivisaires pour établir une convention d’indivision

Conformément à l’article 1873-2 du Code civil, la convention d’indivision doit être conclue par tous les indivisaires. 

« Les coïndivisaires, s’ils y consentent tous, peuvent convenir de demeurer dans l’indivision.

A peine de nullité, la convention doit être établie par un écrit comportant la désignation des biens indivis et l’indication des quotes-parts appartenant à chaque indivisaire. Si les biens indivis comprennent des créances, il y a lieu aux formalités de l’article 1690 ; s’ils comprennent des immeubles, aux formalités de la publicité foncière ».

Une convention obligatoirement écrite et précise

L’article 1873-2 du Code civil édicte certaines règles impératives : 

  • elle doit être établie par écrit ;
  • elle doit lister les biens indivis à peine de nullité de la convention ;
  • elle doit préciser les droits de chaque indivisaire. 

En présence d’un bien immobilier, la convention d’indivision peut-être rédigée par un avocat, ou un notaire si elle doit être enregistrée auprès des Services de publicité foncière (Cass. Civ. 1ère, 10 juillet 2013, no 12-12115). 

« Les coïndivisaires, s’ils y consentent tous, peuvent convenir de demeurer dans l’indivision.

A peine de nullité, la convention doit être établie par un écrit comportant la désignation des biens indivis et l’indication des quotes-parts appartenant à chaque indivisaire. Si les biens indivis comprennent des créances, il y a lieu aux formalités de l’article 1690 ; s’ils comprennent des immeubles, aux formalités de la publicité foncière ».

Durée de la convention d’indivision

La convention peut être conclue pour une durée :

  • déterminée, dans la limite de 5 ans renouvelable ;
  • indéterminée.
Convention à durée déterminée
Durée

L’article 1873-3 du Code civil dispose que « la convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans ». 

« La convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y en a de justes motifs.

La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’un pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée ».

Il existe peu de jurisprudence sur ce point mais selon nous, une convention dont la durée serait supérieure à cinq ans pourrait ne pas être considérée comme nulle ; sa durée d’application serait simplement ramenée à la durée légale.  

Renouvellement possible

La convention d’indivision conclue initialement pour une durée limitée peut être renouvelée par une décision expresse des parties, mais pas obligatoirement écrite. Les indivisaires peuvent également décider qu’elle sera reconduite par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. 

Dans l’hypothèse où la convention est renouvelée avant l’arrivée du terme extinctif, le nouveau délai de cinq ans court à compter du renouvellement, et non à dater de l’expiration de la première convention.

« La convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y en a de justes motifs.

La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’un pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée ».

Survenance du terme

Conformément à l’alinéa 3 de l’article 1873-3 du Code civil, lorsque le terme extinctif de la convention d’indivision survient et sans renouvellement, les parties retombent dans le régime d’indivision légale. 

« La convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y en a de justes motifs.

La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’un pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée ».

Effet de la convention à durée déterminée sur le partage de l’indivision

Une convention d’indivision à durée déterminée soumet le partage à un certain contrôle mais ne l’empêche pas. En effet et selon l’alinéa 1er de l’article 1873-3 du Code civil, le partage peut être provoqué par un Juge pour justes motifs et évidemment en cas d’accord amiable des indivisaires qui peuvent choisir de modifier ou mettre un terme prématuré à leur convention d’indivision

« La convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y en a de justes motifs.

La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’un pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée ».

Convention à durée indéterminée

Les indivisaires peuvent également décider de conclure une convention d’indivision à durée indéterminée. La demande en partage par l’un des indivisaires est moins limitée que dans le cadre d’une convention à durée indéterminée. L’article 1873-3 alinéa 2 du Code civil dispose en effet que : « La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps ».

« La convention peut être conclue pour une durée déterminée qui ne saurait être supérieure à cinq ans. Elle est renouvelable par une décision expresse des parties. Le partage ne peut être provoqué avant le terme convenu qu’autant qu’il y en a de justes motifs.

La convention peut également être conclue pour une durée indéterminée. Le partage peut, en ce cas, être provoqué à tout moment, pourvu que ce ne soit pas de mauvaise foi ou à contretemps.

Il peut être décidé que la convention à durée déterminée se renouvellera par tacite reconduction pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’un pareil accord, l’indivision sera régie par les articles 815 et suivants à l’expiration de la convention à durée déterminée ».

L’indivisaire demandeur n’a ici pas à justifier de justes motifs pour solliciter le partage mais doit éviter les demandes de mauvaise foi ou qui serait défavorable économiquement à l’indivision.  

Gestion de l’indivision : désignation d’un gérant

Les héritiers et ayants droits indivisaires peuvent nommer l’un d’entre eux ou un tiers pour gérer l’indivision. Plusieurs gérants peuvent être nommés concomitamment. 

« Les coïndivisaires peuvent nommer un ou plusieurs gérants, choisis ou non parmi eux. Les modalités de désignation et de révocation du gérant peuvent être déterminées par une décision unanime des indivisaires.

A défaut d’un tel accord, le gérant pris parmi les indivisaires ne peut être révoqué de ses fonctions que par une décision unanime des autres indivisaires.

Le gérant, qui n’est pas indivisaire, peut être révoqué dans les conditions convenues entre ses mandants ou, à défaut, par une décision prise à la majorité des indivisaires en nombre et en parts. Dans tous les cas, la révocation peut être prononcée par le tribunal à la demande d’un indivisaire lorsque le gérant, par ses fautes de gestion, met en péril les intérêts de l’indivision.

Si le gérant révoqué est un indivisaire, la convention sera réputée conclue pour une durée indéterminée à compter de sa révocation ».

Conditions de désignation

En cas d’accord, les coindivisaires peuvent choisir librement un gérant de l’indivision (article 1873-5 alinéa 1 du Code civil). Il peut s’agir d’une personne physique ou d’une personne morale, d’un indivisaire ou d’un tiers à l’indivision. Ils formalisent leur accord dans une convention d’indivision

« Les coïndivisaires peuvent nommer un ou plusieurs gérants, choisis ou non parmi eux. Les modalités de désignation et de révocation du gérant peuvent être déterminées par une décision unanime des indivisaires.

A défaut d’un tel accord, le gérant pris parmi les indivisaires ne peut être révoqué de ses fonctions que par une décision unanime des autres indivisaires.

Le gérant, qui n’est pas indivisaire, peut être révoqué dans les conditions convenues entre ses mandants ou, à défaut, par une décision prise à la majorité des indivisaires en nombre et en parts. Dans tous les cas, la révocation peut être prononcée par le tribunal à la demande d’un indivisaire lorsque le gérant, par ses fautes de gestion, met en péril les intérêts de l’indivision.

Si le gérant révoqué est un indivisaire, la convention sera réputée conclue pour une durée indéterminée à compter de sa révocation ».

A noter qu’un indivisaire peut être considéré comme étant un gérant tacitement choisi par les co-indivisaires dès lors qu’il accomplit des actes de gestion sur les biens indivis, portés à la connaissance des co-indivisaires sans qu’ils forment la moindre opposition.  

Aux termes de l’article 1873-9 du Code civil, en cas de co-gérance, la convention détermine les pouvoirs de chaque gérant. A défaut de répartition claire, chaque gérant détient les pouvoirs déterminés par l’article 1873-6 du Code civil et peut s’opposer à la conclusion d’un acte par un des co-gérants.

« La convention d’indivision peut régler le mode d’administration en cas de pluralité de gérants. A défaut de stipulations spéciales, ceux-ci détiennent séparément les pouvoirs prévus à l’article 1873-6, sauf le droit pour chacun de s’opposer à toute opération avant qu’elle ne soit conclue ».

« Le gérant représente les indivisaires dans la mesure de ses pouvoirs, soit pour les actes de la vie civile, soit en justice, tant en demandant qu’en défendant. Il est tenu d’indiquer, à titre purement énonciatif, le nom de tous les indivisaires dans le premier acte de procédure.

Le gérant administre l’indivision et exerce, à cet effet, les pouvoirs attribués à chaque époux sur les biens communs. Il ne peut, toutefois, disposer des meubles corporels que pour les besoins d’une exploitation normale des biens indivis, ou encore s’il s’agit de choses difficiles à conserver ou sujettes à dépérissement. Toute clause extensive des pouvoirs du gérant est réputée non écrite ».

Missions et pouvoirs

Le gérant désigné de l’indivision peut accomplir tous les actes d’administration et de disposition relatifs aux biens indivis sous réserve des limitations légales ou conventionnelles.

Par référence aux articles 1424 et 1425 du Code civil, le gérant se voit obligé de solliciter l’accord de tous les indivisaires lorsqu’il s’agit aliéner ou grever de droits réels les immeubles, les fonds de commerce et exploitations ou encore les droits sociaux non négociables que sont notamment les parts sociales. En outre, il est interdit au gérant de procéder seul à l’aliénation à titre gratuit des biens indivis.

« Le mari ne peut, sans le consentement de la femme, aliéner ou grever de droits réels les immeubles, fonds de commerce et exploitations dépendant de la communauté, non plus que les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont l’aliénation est soumise à publicité. Il ne peut sans ce consentement percevoir les capitaux provenant de telles opérations.

Il ne peut non plus, sans l’accord de la femme, donner à bail un fonds rural ou un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal. Les baux passés par le mari sur les biens communs sont, pour le surplus, soumis aux règles prévues pour les baux passés par l’usufruitier ».

« La femme a, pour administrer les biens réservés, les mêmes pouvoirs que le mari pour administrer les autres biens communs ».

Ainsi, contrairement aux pouvoirs du représentant des indivisaires désigné dans le cadre de l’article 1844 du Code civil, la liberté du gérant pour aliéner les titres de sociétés est restreinte. 

En savoir plus sur le mandataire de l'indivision sur les parts sociales et actions

L’extension conventionnelle des pouvoirs du gérant n’est pas envisageable car l’article 1873-6 du Code civil spécifie que « toute clause contraire des pouvoirs du gérant est réputée non écrite ».

Cependant, les indivisaires peuvent se mettre d’accord afin que certaines décisions soient prises autrement qu’à l’unanimité. A noter que cette option n’est pas efficace en présence d’incapables ou d’opérations en vue d’une aliénation immobilière (article 1873-8 alinéa 1 et 3 du Code civil). 

« Les décisions qui excèdent les pouvoirs du gérant sont prises à l’unanimité, sauf au gérant, s’il est lui-même indivisaire, à exercer les recours prévus par les articles 815-4,815-5 et 815-6.

S’il existe des incapables mineurs ou majeurs parmi les indivisaires, les décisions dont il est parlé à l’alinéa précédent donnent lieu à l’application des règles de protection prévues en leur faveur.

Il peut être convenu entre les indivisaires qu’en l’absence d’incapables certaines catégories de décisions seront prises autrement qu’à l’unanimité. Toutefois, aucun immeuble indivis ne peut être aliéné sans l’accord de tous les indivisaires, si ce n’est en application des articles 815-4 et 815-5 ci-dessus ».

Rémunération du gérant

Pour les gérants tiers à l’indivision, les propriétaires indivis fixent librement sa rémunération dans la convention d’indivision.

En revanche, en présence d’un gérant-indivisaire, la signature d’une telle convention est interdite car l’article 1873-10 alinéa 1 du Code civil dispose que la rémunération du gérant est fixée par les indivisaires à l’exclusion de l’intéressé. Certains praticiens y ont vu une impossibilité de rémunérer le gérant-indivisaire. Nous pensons que ces dispositions dictent seulement d’opérer la nomination du gérant et sa rémunération dans deux conventions différentes. L’indivisaire promis à devenir gérant participe à la première convention, pas à la seconde qui détermine son éventuelle rémunération.

« Le gérant a droit, sauf accord contraire, à la rémunération de son travail. Les conditions en sont fixées par les indivisaires, à l’exclusion de l’intéressé, ou, à défaut par le président du tribunal judiciaire statuant à titre provisionnel.

Le gérant répond, comme un mandataire, des fautes qu’il commet dans sa gestion ».

 

NOTA : Conformément à l’article 36 de l’ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019, ces dispositions entrent en vigueur au 1er janvier 2020.

Il sera précisé qu’à défaut d’accord, le président du tribunal judiciaire peut être saisi. Il fixera la rémunération du gérant à titre provisoire. En d’autres termes, ce montant est voué à être ajusté ultérieurement en fonction de l’accomplissement de la mission. 

Responsabilité du gérant

Le gérant de l’indivision est responsable de ses actes devant les indivisaires et doit répondre des fautes commises dans sa gestion (article 1873-10 alinéa 2 du Code civil). 

« Le gérant a droit, sauf accord contraire, à la rémunération de son travail. Les conditions en sont fixées par les indivisaires, à l’exclusion de l’intéressé, ou, à défaut par le président du tribunal judiciaire statuant à titre provisionnel.

Le gérant répond, comme un mandataire, des fautes qu’il commet dans sa gestion ».

 

NOTA : Conformément à l’article 36 de l’ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019, ces dispositions entrent en vigueur au 1er janvier 2020.

Il doit rendre compte de sa gestion au moins une fois par an et préciser dans son rapport les bénéfices réalisés et les pertes subies ou à venir (article 1873-11 alinéa 1 du Code civil).

« Chaque indivisaire peut exiger la communication de tous les documents relatifs à la gestion. Le gérant doit, une fois par an, rendre compte de sa gestion aux indivisaires. A cette occasion, il indique par écrit les bénéfices réalisés et les pertes encourues ou prévisibles.

Chaque indivisaire est tenu de participer aux dépenses de conservation des biens indivis. A défaut d’accord particulier, les articles 815-9,815-10 et 815-11 du présent code sont applicables à l’exercice du droit d’usage et de jouissance, ainsi qu’à la répartition des bénéfices et des pertes ».

Conformément aux règles du droit commun du mandat, la responsabilité du gérant de l’indivision : 

  • sera d’autant plus gravement appréciée si une rémunération a été prévue à son profit (article 1992 alinéa 2 du Code civil) ; 
  • suppose la réunion de trois éléments : une faute commise dans la gestion, des conséquences préjudiciables et un lien de causalité entre les deux.

« Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion.

Néanmoins, la responsabilité relative aux fautes est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit qu’à celui qui reçoit un salaire ».

Révocation du gérant

Les alinéas 3 et 4 de l’article 1873-5 du Code civil fixent les conditions de révocation du gérant qui n’est pas indivisaire.

Ainsi, en cas de désignation amiable du mandataire de la succession, la convention d’indivision doit utilement préciser les motifs éventuels de sa révocation. 

A défaut, le gérant ne saurait être révoqué par les indivisaires que sur décision unanime des autres indivisaires.

En cas de désaccord sur la position à tenir face au gérant, tout indivisaire a qualité pour saisir la justice et demander la révocation judiciaire du mandat de gestion.

« Les coïndivisaires peuvent nommer un ou plusieurs gérants, choisis ou non parmi eux. Les modalités de désignation et de révocation du gérant peuvent être déterminées par une décision unanime des indivisaires.

A défaut d’un tel accord, le gérant pris parmi les indivisaires ne peut être révoqué de ses fonctions que par une décision unanime des autres indivisaires.

Le gérant, qui n’est pas indivisaire, peut être révoqué dans les conditions convenues entre ses mandants ou, à défaut, par une décision prise à la majorité des indivisaires en nombre et en parts. Dans tous les cas, la révocation peut être prononcée par le tribunal à la demande d’un indivisaire lorsque le gérant, par ses fautes de gestion, met en péril les intérêts de l’indivision.

Si le gérant révoqué est un indivisaire, la convention sera réputée conclue pour une durée indéterminée à compter de sa révocation ».

Que faire en cas de désaccord entre les indivisaires pour la gestion des biens de la succession ?

Régulation légale des désaccords

Décisions à prendre à la majorité des 2/3 des droits indivis

Majorité applicable aux actes d’administration

Depuis la réforme du 23 juin 2006, les actes d’administration peuvent être effectués à la majorité des deux tiers des indivisaires selon l’article 815-3 1° du code civil. 

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Il s’agit donc d’une gestion majoritaire. Il est important de noter qu’un seul des indivisaires peut détenir 2/3 des droits de l’indivision et décider seul de ces actes. 

Détermination des actes d’administration

Les actes d’administration sont les actes juridiques visant à améliorer un bien et ne conduisant en tous cas pas à une réduction de sa valeur.

Sont ainsi considérés comme des actes d’administration :

  • l’action en bornage (Cass. Civ. 3ème, 12 avril 2018, n° 16-24556) ;
  • l’action en résiliation d’un bail rural (Cass. Civ. 3ème, 29 juin 2011, n° 09-70894).

L’article 815-3 du Code civil dresse également la liste suivante :

  • le mandat général d’administration donné à un indivisaire ou à un tiers pour gérer l’indivision ;
En savoir plus sur l'administration d'une succession par un tiers
  • la vente des meubles indivis pour payer les charges et dettes de l’indivision comme vu précédemment ;
  • la conclusion et le renouvellement des baux autres qu’agricoles, commerciaux, industriels ou artisanaux. La Cour de cassation a récemment réaffirmé que la conclusion d’un bail rural requiert effectivement l’unanimité des indivisaires (3ème civile, 26 janvier 2017, n°14-29.272).

La liste ainsi fixée n’est pas limitative. La loi a prévu une règle ou plus exactement une limite d’ordre général aux possibilités d’administrer un bien indivis à la « seule majorité de deux tiers » : le consentement de tous les indivisaires redevient nécessaire pour conclure un acte qui ne ressort pas de « l’exploitation normale des biens indivis ». L’exploitation normale doit correspondre à une gestion qui ne compromet pas la substance des biens et qui assure leur bon maintien dans le patrimoine. 

Bon à savoir : dans tous les cas, l’alinéa 2 de l’article 815-3 du Code civil précise que les indivisaires qui effectuent un acte d’administration sur un bien indivis sont tenus d’en informer les autres sous peine d’inopposabilité de l’acte à leurs égards. 

Cette inopposabilité peut avoir plusieurs conséquences. La principale d’entre elles est l’impossibilité dans laquelle peut se trouver l’indivisaire qui a engagé les frais de se faire rembourser par les autres membres de l’indivision.

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Décisions à prendre à l’unanimité des indivisaires

L’unanimité s’applique aux actes qualifiés de « graves » et pour lesquels il est nécessaire d’obtenir le consentement de tous les coindivisaires.

À la lecture de l’article 815-3 du Code civil, il s’agit des actes :

  • qui ne relèvent pas de la simple conservation et entretien du bien ;
  • qui ne rentrent pas dans le cadre de l’exploitation normale des biens indivis ;
  • de dispositions autres que la vente de biens meubles indivis (vente d’un bien immobilier, inscription d’une hypothèque, etc.).

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Ainsi, la vente d’un bien immobilier indivis nécessitera obligatoirement le consentement unanime des héritiers et ayants droits coindivisaires tant qu’aucun partage n’est intervenu. 

Si un acte nécessitant l’unanimité des coindivisaires a été accompli sans avoir requis au préalable l’unanimité des voix, il est inopposable aux autres coindivisaires.

Désignation judiciaire d’un administrateur de la succession

La loi du 23 juin 2006 portant réforme du droit des successions a créé un nouvel intervenant dans le cadre du règlement des successions. Il s’agit du mandataire successoral, qui peut être désigné soit de manière conventionnelle par les héritiers dans le cadre d’un accord, ou encore être désigné de manière judiciaire.

Désignation justifiée et nécessaire

L’article 813-1 du Code civil précise que la désignation d’un mandataire doit être justifiée par :

  • l’inertie dans le règlement d’une succession ;
  • la carence ou la faute d’un ou plusieurs héritiers dans l’administration de l’indivision successorale ;
  • la mésentente des héritiers ;
  • une opposition d’intérêts entre eux ;
  • la complexité de la situation successorale.  

« Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l’effet d’administrer provisoirement la succession en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale.

La demande est formée par un héritier, un créancier, toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l’administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant, toute autre personne intéressée ou par le ministère public ».

Bon à savoir : lorsque les conditions imposées par l’article 815-6 du Code civil permettant de solliciter des mesures urgentes au Juge sont réunies, la désignation du mandataire peut également se faire sur ce fondement. 

Le choix entre ces deux fondements juridiques relève d’une stratégie procédurale qui doit être pensée en fonction des autres volets de la procédure en cours. 

En savoir plus sur les conditions de l'articles 815-6 du Code civil (mesures urgentes)

« Le président du tribunal judiciaire peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun.

Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. Cette autorisation n’entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier.

Il peut également soit désigner un indivisaire comme administrateur en l’obligeant s’il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre. Les articles 1873-5 à 1873-9 du présent code s’appliquent en tant que de raison aux pouvoirs et aux obligations de l’administrateur, s’ils ne sont autrement définis par le juge ».

Pouvoirs du mandataire

Les missions du mandataire successoral sont prévues aux articles 813-1 et suivants du code de procédure civile lorsqu’il est judiciairement désigné.

En savoir plus sur l'administration d'une succession par un tiers

« Le juge peut désigner toute personne qualifiée, physique ou morale, en qualité de mandataire successoral, à l’effet d’administrer provisoirement la succession en raison de l’inertie, de la carence ou de la faute d’un ou de plusieurs héritiers dans cette administration, de leur mésentente, d’une opposition d’intérêts entre eux ou de la complexité de la situation successorale.

La demande est formée par un héritier, un créancier, toute personne qui assurait, pour le compte de la personne décédée, l’administration de tout ou partie de son patrimoine de son vivant, toute autre personne intéressée ou par le ministère public ».

Il a notamment les pouvoirs d’effectuer les actes de conservation et d’administration du patrimoine successoral, et peut solliciter l’autorisation du Tribunal afin d’effectuer des actes de disposition nécessaires à la bonne administration de la succession (article 814 du Code civil).

« Lorsque la succession a été acceptée par au moins un héritier, soit purement et simplement, soit à concurrence de l’actif net, le juge qui désigne le mandataire successoral en application des articles 813-1 et 814-1 peut l’autoriser à effectuer l’ensemble des actes d’administration de la succession.

Il peut également l’autoriser, à tout moment, à réaliser des actes de disposition nécessaires à la bonne administration de la succession et en déterminer les prix et stipulations ».

Il peut également payer le passif courant, faire réaliser des travaux d’entretien, ou encore percevoir des loyers et les affecter au paiement des charges, etc.

Bon à savoir : la jurisprudence a précisé que les droits de successions, même en l’absence de mise en demeure de l’administration fiscale n’est pas un passif éventuel, mais certain quand il est échu en raison des règles fiscales applicables à la succession. Leur règlement est nécessaire à la bonne administration de la succession notamment quand elle ne dispose d’aucunes liquidités. Dans une telle hypothèse, le mandataire successoral est bien fondé à solliciter la vente des biens immobiliers dépendant de la succession pour faire face au paiement de ce passif (Cass. Civ. 1ère, 17 octobre 2019 n°18-18915).

Cas spécifique de l’administration d’une société dépendant de la succession

Lorsque le défunt était entrepreneur, agriculteur, artisan, profession libérale, il est nécessaire de s’interroger sur l’administration de la société, le cabinet, l’exploitation d’autant que les règles relatives à l’indivision sont souvent peu propices à leur bonne gestion. 

Un coindivisaire peut –même en l’absence de mandat exprès de la part des autres indivisaires – prendre en charge la gestion de l’entreprise dès lors qu’ils ne s’y opposent pas expressément. 

Selon la configuration de l’entreprise, de la famille ou des relations entre héritiers indivisaires, il est préférable de mandater un indivisaire ou un tiers chargé de gérer l’entreprise (mandat souvent rémunéré). 

En cas de désaccord, les articles 812-1-4 et suivants permettent de saisir le juge afin de confier la gestion de l’entreprise à une personne unique, pour une durée de deux ou cinq ans renouvelables. 

« Le mandat à effet posthume est soumis aux dispositions des articles 1984 à 2010 qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions de la présente section »

Cette décision se prend en fonction : 

  • de la situation des héritiers, 
  • de la complexité de l’actif à gérer, 
  • de l’existence d’un intérêt sérieux et légitime au regard de la personne de l’héritier ou du patrimoine successoral, précisément motivé.

L’administration de la société dépendant de la succession peut également s’envisager sur le plan du droit sociétal. Ainsi en cas de mésentente entre les associés, il sera aussi possible de faire désigner un tiers qui les représentera au regard des statuts de la société et des règles afférentes à cette matière. La procédure ne se déroule alors pas devant le juge chargé du règlement de la succession. C’est le juge « naturel » de l’entreprise concernée qui est saisi : tribunal de commerce pour les sociétés commerciales ou tribunal judiciaire pour les sociétés civiles.

En savoir plus sur la désignation d'un représentant de la société
Bon à savoir : le recours à un mandat à effet posthume, conclu par le chef d’entreprise / gérant de société de son vivant, peut constituer une solution d’attente sereine du partage à venir de l’entreprise. 
En savoir plus sur le mandat à effet posthume

Désignation d’un mandataire unique des actions et parts sociales en indivision

Lorsque la succession est titulaire d’actions et/ou de parts sociales, celles-ci se trouvent en indivision. Les héritiers et ayants droits du défunt se retrouvent ainsi associés ou actionnaires indivis et doivent se mettre d’accord pour exercer leurs droits sociétaux d’une seule voix. 

L’article 815-3 du Code civil contraint même à la désignation d’un mandataire unique des actions et parts sociales même en cas d’accord des coindivisaires pour voter aux assemblées générales.

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Les héritiers et ayants droits sont à la fois indivisaires et associés. Cette situation peut ainsi donner lieu à l’application concurrente des règles relatives à l’indivision et celles relatives au droit des sociétés et créer certaines difficultés. 

Attention : la désignation d’un gérant d’une société est différente de la désignation du mandataire des actions / parts sociales indivises.

Il est donc nécessaire de bien cibler le contexte de la demande de l’indivisaire (indivision ou société).

En savoir plus sur la désignation d'un gérant de société

Autorisation judiciaire d’un héritier indivisaire d’effectuer des actes seuls en cas de péril de l’intérêt commun (article 815-5 du code civil)

Situation de blocage

Dans le cadre d’une indivision, les situations de blocage sont légions. La plus symptomatique d’entre elles survient lorsque un indivisaire s’oppose à la réalisation de la vente du bien indivis. Cette opposition peut parfois être contraire à l’intérêt de l’indivision (qui n’est pas forcément l’intérêt des indivisaires). 

Pour pallier de tels blocages, l’article 815-5 du Code civil prévoit qu’un indivisaire peut être autorisé par un tribunal à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un ou de plusieurs coïndivisaires seraient nécessaire, si le refus de ceux-ci met en péril l’intérêt commun. La mise en vente d’un bien immobilier détenu en indivision fait exactement partie des mesures à ordonner par le juge sur le fondement de l’article 815-5 du code civil.

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun.

Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier.

L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

Dit autrement, la vente de biens indivis – si elle est justifiée par la mise en péril de l’intérêt commun – peut être ordonnée par le Juge malgré le désaccord de certains indivisaires. 

Nécessité de demander une autorisation judiciaire a priori

L’autorisation du juge doit être demandée en amont de tout acte. 

En effet, un indivisaire peut beaucoup plus difficilement être autorisé à régulariser un acte antérieurement accompli – à la saisine du Juge – sans l’accord de ses coïndivisaires sur le fondement de l’article 815-5 du Code civil.

Conséquences

L’acte passé sur autorisation judiciaire fondée sur l’article 815-5 du Code civil est opposable à tous les indivisaires dont le consentement a fait défaut.

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun.

Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier.

L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

Ainsi l’acte produira ses effets à l’égard de tous les indivisaires, y compris les récalcitrants.

Autorisation judiciaire faite à un héritier indivisaire d’engager des mesures urgentes (article 815-6 du code civil)

Principe : autorisation judiciaire d’effectuer des mesures urgentes

L’article 815-6 alinéa 1er du Code civil prévoit que le Président du tribunal judiciaire (ancien Tribunal de grande instance) peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun.

« Le président du tribunal judiciaire peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun.

Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. Cette autorisation n’entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier.

Il peut également soit désigner un indivisaire comme administrateur en l’obligeant s’il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre. Les articles 1873-5 à 1873-9 du présent code s’appliquent en tant que de raison aux pouvoirs et aux obligations de l’administrateur, s’ils ne sont autrement définis par le juge ».

La nature des actes prescrits n’est pas limitée : ainsi un acte de disposition d’un bien indivis peut également être autorisé sur le fondement de l’article 815-6 du Code civil. La jurisprudence est constante sur ce point depuis plusieurs arrêts de la Cour de Cassation : Cass. Civ. 1re, 16 février 1988, n°86-16489.

Conditions afin de mesures urgentes

Deux conditions distinctes sont exigées par le juge saisi : 

  • la mesure doit être urgente ;
  • la mesure doit être justifiée par l’intérêt commun des indivisaires.

Titulaires de l’action afin de mesures urgentes

Le Président du tribunal judiciaire est saisi par un indivisaire mais peut également l’être par un créancier personnel de celui-ci. 

Si le texte est muet sur ce point, la doctrine semble d’accord pour affirmer que l’usufruitier pourrait également saisir le Tribunal sur ce fondement de l’article 815-6 du Code civil : l’usufruit et la nue-propriété portant sur un même bien, il serait effectivement possible d’admettre une extension de l’intérêt commun à l’usufruitier.

Typologie des mesures urgentes

Les deux derniers paragraphes des articles 815-6 et l’article 815-7 du Code civil donnent quelques exemples de mesures que le juge peut ordonner. Il s’agit d’une liste seulement indicative et toutes les configurations sont possibles dès lors que les deux seules conditions prescrites par l’article 815-6 du code civil sont remplies.

Il a ainsi été jugé que le Président du tribunal peut :

  • autoriser un indivisaire à conclure seul un acte de vente d’un bien indivis pourvu qu’une telle mesure soit justifiée par l’urgence et l’intérêt commun (Cass. Civ. 1ère, 4 décembre 2013, n°12-20158) ;
  • ordonner la vente de titres pour payer les frais de partage, dans l’intérêt commun des indivisaires (Cass. Civ. 1ère, 16 février 1988, n°86-16489).

« Le président du tribunal judiciaire peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun.

Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. Cette autorisation n’entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier.

Il peut également soit désigner un indivisaire comme administrateur en l’obligeant s’il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre. Les articles 1873-5 à 1873-9 du présent code s’appliquent en tant que de raison aux pouvoirs et aux obligations de l’administrateur, s’ils ne sont autrement définis par le juge ».

« Le président du tribunal peut aussi interdire le déplacement des meubles corporels sauf à spécifier ceux dont il attribue l’usage personnel à l’un ou à l’autre des ayants droit, à charge pour ceux-ci de donner caution s’il l’estime nécessaire ».

Autorisation judiciaire de vendre à la majorité des 2/3 des biens indivis

L’article 815-5-1 du code civil permet quant à lui de solliciter l’autorisation judiciaire de céder le bien indivis lorsqu’une majorité de 2/3 des biens indivis est atteinte et que leur souhait de vendre le bien a été formalisé devant un notaire. 

Une fois le consentement des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis recueillis par le Notaire, il doit le signifier aux autres indivisaires. 

Si dans un délai de trois mois après que le notaire a signifié aux indivisaires récalcitrants la volonté de céder le bien de leurs coindivisaires aucun retour positif n’est obtenu, alors le notaire dresse un procès-verbal qui permet aux indivisaires de saisir formellement le Tribunal judiciaire afin d’être autorisé à vendre.

En cas d’autorisation, les héritiers et ayants droits demandeurs pourront poursuivre et finaliser la vente envisagée, précision étant donné que cette vente sera opposable aux indivisaires récalcitrants. 

La seule limite posée par le juge est l’absence d’atteinte excessive aux droits des héritiers taisants. C’est le premier fondement permettant la vente d’un bien indivis sans unanimité, sans péril dans les intérêts des indivisaires et sans urgence. C’est donc un outil supplémentaire intéressant pour opérer la vente des biens indivis et le partage de l’indivision.

Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l’un des indivisaires se trouve dans l’un des cas prévus à l’article 836, l’aliénation d’un bien indivis peut être autorisée par le tribunal judiciaire, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.

Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l’aliénation du bien indivis.

Dans le délai d’un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.

Si l’un ou plusieurs des indivisaires s’opposent à l’aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.

Dans ce cas, le tribunal judiciaire peut autoriser l’aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.

Cette aliénation s’effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l’objet d’un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l’indivision.

L’aliénation effectuée dans les conditions fixées par l’autorisation du tribunal judiciaire est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l’intention d’aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa.

Un héritier peut-il occuper un bien de la succession ?

Principe : l’occupation libre du bien indivis

Les indivisaires ont des droits concurrents sur les biens dépendant de l’indivision, c’est-à-dire des droits équivalents. Aucun d’eux n’a dès lors plus le droit d’occuper un bien indivis que les autres. 

Un indivisaire a donc en principe le droit d’occuper un des biens dépendant de l’indivision, tant que cette occupation n’empêche pas aux autres indivisaires de jouir de la même manière du bien, et que cela ne contrevient pas aux éventuelles conventions passées entre eux. 

L’article 815-9 alinéa 1er du code civil prévoit ainsi que chaque indivisaire peut en principe jouir et user des biens dépendant de l’indivision en y mettant toutefois des limites.

Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes régulièrement passés au cours de l’indivision. A défaut d’accord entre les intéressés, l’exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

Cas de l’occupation privative d’un bien immobilier de la succession par un indivisaire

Lorsqu’un indivisaire occupant empêche les autres indivisaires de jouir également du bien indivis son occupation est dite « privative ». Il doit à ce titre verser une indemnité, sauf convention contraire.

Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes régulièrement passés au cours de l’indivision. A défaut d’accord entre les intéressés, l’exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

La cour de cassation a précisé la nature de cette occupation dans de très nombreux arrêts commentés sur le site du cabinet. 

Dans une actualité relativement récente, un arrêt a spécialement attiré notre attention le 03 octobre 2018 n°17-26026. La Cour de cassation y précise que l’occupation ne peut être qualifiée de privative lorsqu’elle n’est pas du fait de l’occupant (pas de démarches positives de l’occupant pour occuper seul le bien soumis à l’indivision).

Cet arrêt démontre que les critères de fixation de l’indemnité d’occupation sont extrêmement protéiformes, parfois abusivement utilisés par la jurisprudence pour éviter des calculs d’indemnité d’occupation.

Il en ressort une leçon importante : l’obtention d’une indemnité d’occupation doit être sérieusement travaillée juridiquement et factuellement entre l’avocat et son client. La preuve de l’occupation seule par un indivisaire est souvent insuffisante. Il faut en outre déterminer que l’occupation par cet indivisaire empêche les autres indivisaires d’utiliser également le bien s’ils le souhaitent (Civ 1ère 5 septembre 2018 n°17-22439) et prêter attention aux conditions dans lesquels cette occupation s’est mise en place (Civ 1ère 03 octobre 2018 n°17-26026).

La preuve de ces éléments doit elle-même être travaillée. Elle peut matériellement être apportée par tous moyens : 

  • constat d’huissier de l’occupation en personne, 
  • preuve de la détention de jeux de clés, 
  • production d’attestations de tiers en justice, 
  • communication de pièces relatives aux charges courantes,
  • factures au nom de l’indivisaire occupant,
  • etc.

Conséquence de l’occupation privative d’un bien immobilier de la succession par un indivisaire : l’indemnité d’occupation

Principe

Lorsque l’occupation peut effectivement être qualifiée de privative, l’indivisaire doit verser à l’indivision une « indemnité d’occupation ». Il s’agit d’une somme comparable à un loyer puisqu’elle est fonction de la valeur locative du bien. 

L’indemnité d’occupation est due jusqu’à la fin de l’occupation privative. La preuve de ce terme doit, selon les configurations, être rapportée : 

  • par le ou les indivisaires non occupants au moment de rapporter la preuve de l’occupation elle-même, 
  • par l’indivisaire occupant s’il estime que la fin de son occupation est antérieure à celle avancée par les indivisaires demandeurs.

L’indemnité d’occupation peut également prendre fin lorsque le bien est attribué à l’indivisaire occupant. Attention toutefois, dans le cadre des opérations de partage, il est possible que le bien occupé fasse l’objet d’une attribution préférentielle

En savoir plus sur l'attribution préférentielle

Selon l’article 834 du code civil, le jugement, qui prévoit l’attribution préférentielle du bien occupé, ne fait pourtant pas cesser l’indemnité d’occupation. C’est le partage effectif, marqué par l’attribution réelle du bien opérant transfert de propriété, qui doit être considéré.

« Le bénéficiaire de l’attribution préférentielle ne devient propriétaire exclusif du bien attribué qu’au jour du partage définitif.

Jusqu’à cette date, il ne peut renoncer à l’attribution que lorsque la valeur du bien, telle que déterminée au jour de cette attribution, a augmenté de plus du quart au jour du partage indépendamment de son fait personnel ».

Dans le cadre d’une adjudication judiciaire le transfert de propriété est immédiat, et fait cesser l’indivision ce qui met de facto fin à l’indemnité d’occupation

Montant de l’indemnité d’occupation

L’indemnité d’occupation est calculée en fonction de la valeur locative mensuelle du bien occupée. 

Pour autant, elle n’est pas un loyer à proprement parler. La jurisprudence considère que l’occupation « de fait » par l’un des indivisaires est moins sécurisante pour lui que celle du locataire, encadrée et protégée par un contrat de bail lui-même soumis à la loi 89-462 du 06 juillet 1989. 

La conséquence de la précarité de cette occupation est l’application assez systématique par les juges et les Notaires chargés du règlement d’une succession d’une décote généralement comprise entre 10% et 30%. Ce pourcentage doit faire l’objet d’un débat. L’idée selon laquelle un abattement moyen de 20% est seule applicable doit être combattue. La précarité de l’occupation doit être appréciée au cas par cas.

Exemple de calcul : dans le cadre d’une indivision détenue par deux héritiers par moitié, dont la valeur locative est de 1000€ par mois, l’indemnité sera ainsi calculée : 
1000€x80%2 = 400€ indemnité d’occupation.

Prescription de l’indemnité d’occupation

Les actions relatives à la fixation d’une indemnité d’occupation pour jouissance privative d’un bien indivis et la perception des loyers d’un bien indivis par un indivisaire seul se prescrivent par 5 ans.

En application de l’article 2224 du code civil, il n’est pas possible de réclamer le paiement des indemnités d’occupations sur des périodes de plus de cinq ans à partir du moment où l’indemnité est due (Civ. 1re, 8 juin 2016, no 15-19.614).

« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »

Cette prescription de 5 ans est également rappelée par l’article 815-10 du Code civil qui précise qu’ « aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être ».

« Sont de plein droit indivis, par l’effet d’une subrogation réelle, les créances et indemnités qui remplacent des biens indivis, ainsi que les biens acquis, avec le consentement de l’ensemble des indivisaires, en emploi ou remploi des biens indivis.

Les fruits et les revenus des biens indivis accroissent à l’indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise ».

Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l’être.

Chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes proportionnellement à ses droits dans l’indivision ».

Les décisions judiciaires mettent fin à la prescription. Ainsi, les arriérés d’indemnité d’occupation échus postérieurement à une décision judiciaire ayant force exécutoire, qui a reconnu cette créance d’indemnité d’occupation, échappent à la prescription.

Les indivisaires ont donc intérêt à formuler rapidement une demande au titre du paiement de l’indemnité d’occupation, ou établir un acte interruptif de prescription : 

  • Établissement d’un procès-verbal de difficulté auprès d’un notaire (Ccass , 1ème Civ, 7 février 2018  n°16-28686). 
  • Action judiciaire afin de paiement d’une indemnité d’occupation
  • Etc.

Expulsion de l’indivisaire occupant

Les indivisaires ont en principe le droit de jouir des biens de l’indivision

Leur expulsion est en conséquence envisagée dans des cas sensibles, notamment lorsque l’occupation crée un trouble manifestement illicite.

La 1ère chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 30 janvier 2019 n°18-12403 a également rappelé la possibilité d’obtenir l’expulsion de l’indivisaire occupant dont le maintien dans les lieux est incompatible avec les droits concurrents des autres indivisaires. 

En l’espèce, deux ex-époux étaient propriétaires d’un bien indivis occupé par l’ex-épouse. Celle-ci n’avait pas payé d’indemnité d’occupation depuis une dizaine d’années, refusait l’accès au bien pour l’établissement des diagnostics nécessaire à la licitation, etc. en résumé elle faisait obstacle au partage.

La Cour d’appel de Reims va ordonner l’expulsion de l’indivisaire occupante, qui va se pourvoir en cassation. La haute juridiction va retenir que « qu’après avoir exactement énoncé qu’aux termes de l’article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires, l’arrêt constate que Mme X… occupe l’immeuble indivis sans avoir versé aucune somme au titre de l’indemnité d’occupation dont elle est redevable depuis 2004 et, qu’à la suite du jugement ayant ordonné la licitation de ce bien, elle n’a répondu ni à la lettre simple ni à la lettre recommandée du notaire lui demandant de procéder ou de le laisser procéder aux diagnostics immobiliers nécessaires et ne s’est pas plus manifestée auprès de l’commissaire de justice qui s’est rendu sur les lieux sans pouvoir la rencontrer ; qu’en l’état de ces énonciations, la cour d’appel a souverainement estimé, par une décision motivée, que le maintien dans les lieux de Mme X… était incompatible avec les droits concurrents de M. Y… sur l’immeuble indivis et a pu en déduire l’existence d’un trouble manifestement illicite ; que le moyen n’est pas fondé».

La position de la Cour de cassation n’est pas nouvelle ; elle avait déjà statué en ces termes (Cass Civ 1ère 26 octobre 2011 n°10-21802). 

La demande d’expulsion étant une mesure conservatoire, la procédure peut être initiée par un indivisaire seul dans l’intérêt de l’indivision.

Peut-on vendre les biens dépendant de la succession ?

Le partage de la succession ne s’entend pas obligatoirement de l’attribution des biens mobiliers ou immobiliers aux héritiers. Ces biens peuvent ne pas être commodément partageables ou leur vente peut s’avérer indispensable à la conservation de l’intérêt de l’indivision ou simplement utile au partage.

Il est donc tout à fait possible de vendre les biens dépendant de la succession, en cas d’accord entre les héritiers, et même s’il existe un désaccord entre indivisaires dans certains cas spécifiques.

Cession d’un bien dépendant de l’indivision successorale

Les indivisaires ont la possibilité de céder les biens dépendant de l’indivision successorale. Toutefois, cette possibilité est encadrée par la loi, en fonction de la nature des biens et de l’utilité de la vente au regard de l’intérêt de l’indivision

La vente en cas d’accord des héritiers indivisaires

La vente de biens meubles

En ce qui concerne les biens meubles indivis, l’article 815-3 3°du code civil prévoit qu’une simple majorité des 2/3 des indivisaires permet de vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision. Dans ces conditions, la vente est opposable aux indivisaires récalcitrants, à condition qu’ils en aient préalablement été informés. 

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

Il s’agit d’un mode de gestion relativement souple, prompt à fluidifier le règlement des successions

Toutefois, cette vente n’est possible que si le produit de cession est affecté au paiement des dettes et charges de l’indivision. Il n’est donc pas possible de l’envisager dans l’optique d’un partage des sommes entre les indivisaires s’il n’existe pas un accord unanime entre eux. 

La vente de biens immeubles

L’aliénation de biens immeubles a généralement des conséquences plus importantes pour l’indivision que la vente des meubles. La législation est logiquement plus exigeante et impose le principe général du consentement de tous les indivisaires afin de céder un bien immobilier (article 815-3 du code civil).

La vente reste possible en l’absence d’unanimité par autorisation judiciaire.

« Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d’administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l’un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d’administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l’indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d’en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l’exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d’administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux ».

La vente judiciaire en cas de désaccord des héritiers indivisaires

Fondements juridique de saisine du Tribunal

A défaut d’accord unanime des indivisaires pour la vente des biens immeubles, ou dans le cadre de la vente de biens meubles dans un autre objectif que l’apurement du passif de la succession, les indivisaires ont la possibilité de saisir le Tribunal judiciaire du lieu d’ouverture de la succession (et surtout pas le lieu de situation de l’immeuble !) afin de solliciter l’autorisation judiciaire de céder les biens indivis. 

Cette autorisation permet de passer outre la position d’un ou de plusieurs indivisaires récalcitrants pour faciliter par exemple le règlement de la succession.

Plusieurs fondements peuvent être envisagées pour forcer la vente d’un bien détenu en indivision : 

  • article 815 du code civil,
  • article 815-5 du code civil, 
  • article 815-5-1 du code civil, 
  • article 815-6 du code civil. 

« Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué, à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ».

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun.

Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier.

L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l’un des indivisaires se trouve dans l’un des cas prévus à l’article 836, l’aliénation d’un bien indivis peut être autorisée par le tribunal judiciaire, à la demande de l’un ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.

Le ou les indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l’aliénation du bien indivis.

Dans le délai d’un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.

Si l’un ou plusieurs des indivisaires s’opposent à l’aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.

Dans ce cas, le tribunal judiciaire peut autoriser l’aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.

Cette aliénation s’effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l’objet d’un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l’indivision.

L’aliénation effectuée dans les conditions fixées par l’autorisation du tribunal judiciaire est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l’intention d’aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa.

« Le président du tribunal judiciaire peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l’intérêt commun.

Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l’indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l’emploi. Cette autorisation n’entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l’héritier.

Il peut également soit désigner un indivisaire comme administrateur en l’obligeant s’il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre. Les articles 1873-5 à 1873-9 du présent code s’appliquent en tant que de raison aux pouvoirs et aux obligations de l’administrateur, s’ils ne sont autrement définis par le juge ».

L’article 815-5 du code civil permet d’obtenir l’autorisation judiciaire de céder des biens indivis, notamment lorsque le refus d’un des indivisaires met en péril l’intérêt commun. 

L’article 815-5-1 du code civil permet de solliciter l’autorisation judiciaire de céder le bien indivis lorsqu’une majorité de 2/3 des biens indivis est atteinte et que leur souhait de vendre le bien a été formalisé devant un notaire. 

Si dans un délai de trois mois après que le notaire a signifié aux indivisaires récalcitrants la volonté de céder le bien de leurs coindivisaires aucun retour positif n’est obtenu, alors le notaire dresse un procès-verbal qui permet aux indivisaires de saisir formellement le Tribunal judiciaire afin d’être autorisé à vendre.

Quant à l’article 815-6 du code civil, il permet la cession des biens indivis, et toutes autres mesures urgentes que requiert l’intérêt commun. 

Attention toutefois, la cession des biens indivis litigieux n’emporte pas le partage de l’indivision, même partiellement, puisque le prix de cession se substitue au bien indivis. Il faut donc que les indivisaires, s’ils souhaitent répartir ce prix de cession formalisent entre eux un partage. 

En savoir plus sur le partage et la liquidation de la succession
 Forme de la cession des biens indivis

En fonction de la demande formulée et de la procédure engagée, la vente des biens indivis lorsqu’elle est autorisée judiciairement, peut se faire soit de gré à gré soit par le biais d’une licitation judiciaire

Vente de gré à gré

L’autorisation judiciaire de céder les biens dépendant de l’indivision n’aboutit pas inexorablement à une licitation judiciaire (vente aux enchères). Il est tout à fait possible qu’une vente « classique », dite de gré à gré, soit autorisée par le Tribunal.

Elle est notamment relativement aisée à obtenir en cas de désistement d’un indivisaire après la signature d’une promesse de vente. Ses coindivisaires peuvent être amenés à solliciter judiciairement l’autorisation de réitérer seuls l’acte authentique de vente.  

Or tout avant contrat, la vente de gré à gré peut être autorisée dans tout contexte qui serait favorable à l’indivision. L’autorisation judiciaire donnée à l’indivisaire demandeur est relativement encadrée par le Tribunal avec un plancher en-deçà duquel le bien ne pourra être cédé.

Licitation judiciaire 

On appelle « licitation judiciaire » la vente judiciaire régie par les articles 1271 à 1281 du code de procédure civile. Il s’agit en pratique d’une mise aux enchères reçue par le notaire commis par le tribunal dans le cadre du jugement d’autorisation de vente, ou à l’audience des criées par le juge désigné par le Tribunal Judiciaire. Les formes des enchères sont celles prévues classiquement pour les enchères en matière de saisie immobilière. 

Les indivisaires ne perdent pas pour autant tout contrôle ou toute possibilité d’intervenir à la vente. Ils peuvent notamment demander au juge d’insérer dans le cahier des conditions générales de vente des clauses : 

  • favorables à l’indivision sur la question du prix, 
  • permettant de qualifier l’opération de partage et non de cession si l’un des indivisaires se porte acquéreur (économisant ainsi de nombreux frais de licitation),
  • etc.

« La vente judiciaire des immeubles et des fonds de commerce appartenant à des mineurs en tutelle ou à des majeurs en tutelle ne peut être ordonnée qu’au vu d’une délibération du conseil de famille énonçant la nature des biens et leur valeur approximative.

Cette délibération n’est pas nécessaire si les biens appartiennent en même temps à des majeurs capables et si la vente est poursuivie par eux. Il est alors procédé conformément aux règles prévues pour les partages judiciaires ».

En outre, dans un but de protection des coindivisaires contre l’intrusion d’une personne étrangère sur le point d’acheter tout ou partie des droits indivisaires, l’article 815-5 du code civil accorde aux indivisaires la faculté de se substituer à l’adjudicataire après l’adjudication du bien indivis. Le montant sera celui de la dernière surenchère lors de l’adjudication, et l’action pourra être exercée dans un délai d’un mois à compter de l’adjudication.

« Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d’un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l’intérêt commun.

Le juge ne peut, à la demande d’un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier.

L’acte passé dans les conditions fixées par l’autorisation de justice est opposable à l’indivisaire dont le consentement a fait défaut ».

Cession des droits indivis

Certaines indivisions étant particulièrement compliquées à gérer, il peut également arriver que des indivisaires se désintéressent des biens indivis sans pour autant vouloir renoncer à la succession dont ils dépendent, etc. Ils peuvent alors s’interroger sur la possibilité de céder non pas un bien de l’indivision, mais de céder leurs droits, leur quote-part indivise.

Cession entre indivisaires

La cession entre indivisaires de tout ou partie des droits entre indivisaires est libre. Elle doit en revanche être formalisée en fonction de la nature des biens cédés et permettre ainsi d’acter de l’accord des indivisaires. 

La « cession » de droit indivis sur un bien immobilier doit par exemple faire l’objet d’un acte notarié.

La jurisprudence a précisé que la cession entre indivisaires n’est pas considérée comme une cession à titre onéreux ouvrant un droit à préemption pour les autres indivisaires sur le fondement de l’article 815-14 du code civil (Civ 3ème 24 novembre 2010 n°09-69.327). Autrement dit, un indivisaire peut céder librement à un autre indivisaire ses droits sur le bien soumis à l’indivision sans avoir à purger un droit de préemption aux autres indivisaires. 

L’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.

Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés.

En cas de préemption, celui qui l’exerce dispose pour la réalisation de l’acte de vente d’un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.

Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision.

Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, l’article 828 est applicable.

Cession à des tiers

La cession de la quote-part indivise à des tiers -prévue à l’article 815-14 du code civil- est plus contraignante. L’objectif principal est la protection des indivisaires non-cédants en leur permettant de conserver autant que possible le bien et d’éviter l’entrée de tiers dans l’indivision

L’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.

Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés.

En cas de préemption, celui qui l’exerce dispose pour la réalisation de l’acte de vente d’un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.

Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision.

Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, l’article 828 est applicable.

Notification de l’intention de cession

L’indivisaire qui entend céder sa quote-part de droits indivis à un tiers doit notifier par acte d’huissier ses intentions à ses coindivisaires. 

La notification doit comporter tous les éléments relatifs à la cession envisagée et notamment l’information principale qu’est le prix de cession envisagée, ainsi que les coordonnées de l’acquéreur potentiel. Ce préalable est indispensable à la cession qui est nulle à défaut de le satisfaire. 

L’action se prescrivant par 5 ans à compter de la vente (article 815-16 du code civil).

« Est nulle toute cession ou toute licitation opérée au mépris des dispositions des articles 815-14 et 815-15. L’action en nullité se prescrit par cinq ans. Elle ne peut être exercée que par ceux à qui les notifications devaient être faites ou par leurs héritiers ».

Droit de préemption des indivisaires

Une fois que les indivisaires non-cédants se sont vu notifier le souhait de leur coindivisaire de céder ses droits à un tiers, ils bénéficient dans un délai de deux mois de la possibilité de préempter c’est-à-dire acquérir le bien par préférence à l’acquéreur initialement envisagé, et dans les mêmes conditions. 

En cas de demandes de préemptions multiples, l’article 815-14 du code civil prévoit que la quote-part préemptée est répartie entre les indivisaires qui ont fait valoir leurs intentions. 

L’indivisaire cédant n’a pas d’autre choix que d’accepter de céder sa quote-part de droits à son coindivisaire qui peut le contraire à régulariser à son profit puisqu’il se substitue à l’acquéreur évincé en tous ses droits et toutes ses obligations (Civ 1ère 26 Mars 1996 n°93-17.574).

L’indivisaire qui entend céder, à titre onéreux, à une personne étrangère à l’indivision, tout ou partie de ses droits dans les biens indivis ou dans un ou plusieurs de ces biens est tenu de notifier par acte extrajudiciaire aux autres indivisaires le prix et les conditions de la cession projetée ainsi que les nom, domicile et profession de la personne qui se propose d’acquérir.

Tout indivisaire peut, dans le délai d’un mois qui suit cette notification, faire connaître au cédant, par acte extrajudiciaire, qu’il exerce un droit de préemption aux prix et conditions qui lui ont été notifiés.

En cas de préemption, celui qui l’exerce dispose pour la réalisation de l’acte de vente d’un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au vendeur. Passé ce délai, sa déclaration de préemption est nulle de plein droit, quinze jours après une mise en demeure restée sans effet, et sans préjudice des dommages-intérêts qui peuvent lui être demandés par le vendeur.

Si plusieurs indivisaires exercent leur droit de préemption, ils sont réputés, sauf convention contraire, acquérir ensemble la portion mise en vente en proportion de leur part respective dans l’indivision.

Lorsque des délais de paiement ont été consentis par le cédant, l’article 828 est applicable.

Les biens de l’indivision peuvent-ils être saisis ?

Les indivisaires détiennent des droits concurrents sur les biens dépendant de l’indivision successorale, pourtant les biens indivis ne doivent pas -du fait de leur caractère indivis- être traités comme des biens dont ils seraient pleins et entiers propriétaires. 

L’article 815-17 du code civil prévoit un régime du droit de poursuite différent, selon que les créanciers auraient pu exercer leurs droits avant que les biens ne deviennent indivis, que leur créance est née du fait de la gestion de l’indivision ou encore qu’elle est personnelle à l’un des indivisaires. 

« Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu’il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l’actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.

Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles.

Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis. »

Saisie des biens indivis par les créanciers de la succession

Les créanciers de la succession sont ceux dont les droits découlent directement de la succession et du fait de la personne décédée. Il s’agit par exemple de détenteurs de créances impayées du vivant du de cujus

Ils ont la possibilité soit d’être payés dans le cadre des opérations de partage (et avant les distributions aux héritiers), soit de poursuivre la saisie et la vente des bien indivis afin que leur créance puisse être réglée. Ils peuvent également envisager de saisir les biens personnels des indivisaires qui ont accepté purement et simplement la succession et sont donc redevable du passif de celle-ci, mais uniquement dans la limite des droits de ces derniers dans la succession.

La jurisprudence est venue rappeler que le bénéficiaire d’une sûreté légale antérieure à la naissance de l’indivision était bien fondé à actionner sa garantie sur les bien indivis (Civ 1ère 19 janvier 2019 n°17-27.411), sans qu’il ne soit nécessaire de réaliser au préalable une procédure de partage.

Saisie des biens indivis par les créanciers de l’indivision

Les créanciers de l’indivision sont ceux dont la créance est née du fait de la gestion ou de la conservation des biens indivis. Il s’agit fréquemment de l’administration fiscale dont certains avis de taxe n’auraient pas été réglés, ou encore de professionnels ayant réalisés des travaux sur des biens indivis et qui n’auraient pas été réglés, etc.

Ils ont la possibilité soit d’être payés dans le cadre des opérations de partage (et avant les distributions aux héritiers), soit de poursuivre la saisie et la vente des bien indivis afin que leur créance puisse être réglée.

La jurisprudence a précisé que le créancier de l’indivision pouvait également être un indivisaire lorsque celui-ci a réglé à titre personnel des dettes relatives à la gestion où à la conservation des biens indivis. Il n’est pas tenu de d’attendre les opérations de partage et l’établissement des comptes d’administration pour se faire régler de sa créance (Civ 1ère 20 février 2001 n°98-13.006). 

Saisie des biens indivis par les créanciers d’un héritier indivisaire

Principe : interdiction de la saisie directe

Contrairement aux créanciers de la succession et aux créanciers de l’indivision, les créanciers personnels des indivisaires n’ont pas la possibilité de saisir directement les biens indivis afin de se faire payer de leurs droits. 

L’article 815-17 du code civil prohibe ainsi toute exécution forcée sur les bien indivis par les créanciers personnels des indivisaires.

« Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu’il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l’actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.

Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles.

Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis. »

Les créanciers ont néanmoins la possibilité de prendre des garanties sur la part de l’indivisaire qui leur est redevable (Civ 2ème 17 février 1983) et non pas directement sur le bien indivis

Aménagement : action oblique (ou l’exercice des droits à la place de l’héritier indivisaire)

Le filtre de l’indivision ne rend pas pour autant impossible pour les créanciers personnels le paiement sur les biens indivis. Les créanciers personnels des indivisaires peuvent en effet provoquer le partage de l’indivision en lieu et place de leur débiteur par le biais de l’action oblique en partage prévue par le dernier alinéa de l’article 815-17 du code civil. 

« Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu’il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l’actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.

Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles.

Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis. »

L’action oblique est prévue par l’article 1341-1 du code civil qui dispose que « Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne. »

Le créancier exerçant l’action oblique exerce donc « en son nom propre, le droit et l’action que la loi lui confère à cet égard ayant exclusivement pour cause et pour effet de sauvegarder son intérêt personnel » (Civ 1ère 9 Décembre 1970 Bull.Civ. I n°325).

« Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne. »

Il peut donc assigner sur ce fondement les coindivisaires de son débiteur à fins de comptes, liquidation et partage pour que sa créance soit payée sur la part à recevoir par ce dernier dans le cadre des opérations de partage judiciaire.

En savoir plus sur les modalités de partage judiciaire

Comment sortir de l’indivision ? Le partage

Toute succession, que ce soit à titre amiable ou judiciaire, s’achève par sa liquidation et son partage. 

Il s’agit schématiquement :

  • de faire les comptes entre les héritiers : inventaire des biens meubles avoirs financiers et biens immeubles, avances et donations reçues par les héritiers, frais avancées, dettes et créances entre héritiers et avec les tiers, etc. ; 
  • de liquider la succession, en déterminant les droits des héritiers : détermination du schéma familial, testament, rapport, évaluation et imputation des donations, etc. ;
  • de partager les biens existants en fonction des droits ainsi déterminés.
En savoir plus sur le partage entre les héritiers

Exceptions pour les territoires d’outre-Mer

Les règles relatives à la gestion et à la sortie de l’indivision sont homogènes pour les territoires de France Métropolitaine, mais il existe un régime dérogatoire pour les territoires ultramarins, mis en place par la loi n°2018-1244 du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l’indivision successorale et à relancer la politique du logement en Outre-Mer. Ce régime est venu adapter les modalités de sortie et de gestion de l’indivision pour certains départements français en raison du contexte socio-économique local et d’une pression foncière importante. 

Ce régime dérogatoire est à la fois limité dans l’espace (La Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, la Réunion et Mayotte, Saint-Barthélemy, Saint Martin et Saint-Pierre et Miquelon), mais également dans le temps car ce régime dérogatoire ne devant être appliqué que pour une période de 10 ans aux successions ouvertes avant le 31 décembre 2018. 

Des dispositions dérogatoires plus souples (avec des quorum de majorités abaissés à 50% des droits indivis notamment) sont prévus pour l’administration et la vente des biens dépendant de l’indivision

Cet article vous intéresse ? Découvrez aussi les contenus suivants

Guide des successions

01

Demander le partage : la procédure judiciaire de comptes, liquidation et partage d'une succession

jurisprudences et lois commentées

Droit du patrimoine
Publié le 19 Juin 2023

jurisprudences et lois commentées

Droit des successions
Publié le 28 Nov 2022