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L’administration fiscale dispose d’un pouvoir de contrôle sur la déclaration de succession appelée « reprise fiscale ». Il s’agit d’un droit conféré à l’administration fiscale de rectifier les omissions, insuffisances et erreurs que le redevable a pu commettre dans la déclaration de son impôt. Elle existe pour tout type d’impôt, et notamment en matière de droit de succession

Pendant combien de temps l’administration fiscale peut-elle contrôler la déclaration de succession ? 

Le délai ouvert à l’administration fiscale pour contrôler la déclaration de succession diffère selon les circonstances. 

Le délai classique

Selon l’article L180 du livre des procédures fiscales, l’administration fiscale peut exercer son contrôle sur la déclaration de succession de son dépôt jusqu’au 31 décembre de la 3ème année qui suit celle du dépôt. 

Exemple : si les héritiers déposent une déclaration de succession le 4 avril 2020, l’administration fiscale aura jusqu’au 31 décembre 2023 pour effectuer son contrôle. 

« Pour les droits d’enregistrement, la taxe de publicité foncière, les droits de timbre, ainsi que les taxes, redevances et autres impositions assimilées, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle de l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou de l’accomplissement de la formalité fusionnée définie à l’article 647 du code général des impôts ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière des redevables ayant respecté l’obligation prévue à l’article 982 du même code, jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.

Toutefois, ce délai n’est opposable à l’administration que si l’exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière, par le dépôt de la déclaration et des annexes mentionnées au même article 982, sans qu’il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures. »

Les délais étendus

La prescription sexennale 

Si aucune déclaration de succession n’est déposée, ou si l’administration fiscale a dû procéder à des recherches pour vérifier la véracité des déclarations et l’exactitude des calculs des droits de successions, elle dispose, aux termes du second alinéa de l’article L180 et de l’article L186 du livre des procédures fiscales, d’un délai allongé. 

Celui-ci s’étend alors du décès du défunt jusqu’au 31 décembre de la sixième année qui suit. 

Exemple : si le défunt décède le 15 mars 2020, l’administration fiscale pourra exercer son droit de reprise jusqu’au 31 décembre 2026.

« Pour les droits d’enregistrement, la taxe de publicité foncière, les droits de timbre, ainsi que les taxes, redevances et autres impositions assimilées, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle de l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration ou de l’accomplissement de la formalité fusionnée définie à l’article 647 du code général des impôts ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière des redevables ayant respecté l’obligation prévue à l’article 982 du même code, jusqu’à l’expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due.

Toutefois, ce délai n’est opposable à l’administration que si l’exigibilité des droits et taxes a été suffisamment révélée par le document enregistré ou présenté à la formalité ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière, par le dépôt de la déclaration et des annexes mentionnées au même article 982, sans qu’il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures. »

« Lorsqu’il n’est pas expressément prévu de délai de prescription plus court ou plus long, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l’impôt. »

Les prescriptions spéciales

La prescription décennale en cas d’avoirs dissimulés à l’étranger

Si les héritiers ont dissimulé des comptes bancaires, des contrats d’assurance-vie ou des trusts détenus par le défunt à l’étranger, l’administration fiscale dispose d’un délai de reprise expirant au 31 décembre de la 10ème année suivant le décès du défunt. 

Exemple : si le défunt est décédé le 4 avril 2020, l’administration fiscale pourra agir jusqu’au 31 décembre 2030.

« Par exception au premier alinéa de l’article L. 180 et à l’article L. 181, le droit de reprise de l’administration relatif aux impôts et droits qui y sont mentionnés peut s’exercer jusqu’à l’expiration de la dixième année suivant celle du fait générateur de ces impôts ou droits quand ils sont assis sur des biens ou droits mentionnés aux articles 1649 A, 1649 AA et 1649 AB du code général des impôts, sauf si l’exigibilité des impôts ou droits relatifs aux biens ou droits correspondants a été suffisamment révélée dans le document enregistré ou présenté à la formalité ou, pour l’impôt sur la fortune immobilière, par la déclaration et les annexes mentionnées à l’article 982 du même code. »

La prescription sexennale en cas de versement du capital d’une assurance-vie par la Caisse des dépôts et des consignations

Si les bénéficiaires des contrats d’assurance-vie souscrits par le défunt ne sont pas manifestés auprès des compagnies d’assurance dans les 10 années qui suivent le décès, ces dernières sont tenues de verser le capital du contrat à la Caisse des dépôts et des consignations. Ces sommes sont alors conservées pendant 20 ans par la Caisse qui peut alors, sur présentation de pièces justificatives, verser le capital au bénéficiaire qui se manifeste dans ce délai. 

En pareille hypothèse de versement tardif du capital du contrat d’assurance-vie, l’administration fiscale dispose d’un délai de reprise expirant :

  • en cas d’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration révélant ce payement : au 31 décembre de la troisième année qui suit l’enregistrement dudit acte ;
  • en l’absence de l’enregistrement d’un tel acte ou déclaration : au 31 décembre de la sixième année suivant le versement des sommes. 
Exemple : si le versement a lieu le 4 avril 2020, l’administration fiscale pourra agir jusqu’au 31 décembre 2026 en l’absence d’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration révélant ce versement. En revanche, si un tel acte ou une telle déclaration a été enregistrée, le 5 mai 2020, par exemple, alors l’administration fiscale pourra agir jusqu’au 31 décembre 2023. 
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« Par dérogation aux articles L. 180 et L. 186 du présent livre, l’administration dispose, pour le contrôle des droits de mutation par décès dus sur les sommes versées par la Caisse des dépôts et consignations en application du V de l’article L. 312-20 du code monétaire et financier et du dernier alinéa du III des articles L. 132-27-2 du code des assurances et L. 223-25-4 du code de la mutualité, d’un droit de reprise qui s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle de l’enregistrement d’un acte ou d’une déclaration qui révèle suffisamment l’exigibilité de ces droits ou, en l’absence d’un tel acte ou d’une telle déclaration, jusqu’à l’expiration de la sixième année suivant celle du versement de ces sommes. »

La prescription biennale en cas de révélation d’une omission ou insuffisance par une procédure judiciaire ou administrative

L’article L188 C du livre des procédures fiscales permet à l’administration d’exercer son droit de reprise jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit la décision clôturant la procédure judiciaire ou administrative portant sur un litige successoral. 

Un délai préfixe est également prévu : ce report de la prescription ne peut avoir pour effet de permettre à l’administration fiscale d’agir après le 31 décembre de la 10ème année suivant l’expiration du délai pour s’acquitter des droits de succession

Exemple n°1 : le défunt décède en France le 6 août 2007. Une procédure judiciaire ou administrative portant sur la succession (et ayant vocation à modifier les droits de succession des héritiers) donne lieu à une décision qui devient définitive le 15 mai 2015, l’administration fiscale disposera d’un délai de reprise jusqu’au 31 décembre 2016. Le délai pour s’acquitter des droits expirait au 6 janvier 2008. Le report de la prescription au 31 décembre 2016 est possible car l’administration aura quand même agi dans les 10 ans. 
Exemple n°2 : le défunt est décédé le 6 août 2003. Le délai pour déclarer la succession expire le 6 janvier 2005. Une procédure judiciaire ou administrative portant sur la succession (et ayant vocation à modifier les droits de succession des héritiers) donne lieu à une décision qui devient définitive le 15 mai 2015. L’administration fiscale disposera alors, en principe, d’un délai de reprise jusqu’au 31 décembre 2016. 

Cependant, le délai butoir de 10 ans s’oppose à la prescription étendue en pareil cas. Le délai pour déclarer la succession expirant le 6 janvier 2004, l’administration fiscale ne pourra plus agir après le 31 décembre 2015. En pareil cas, la prescription spécifique de l’article L188 C du livre des procédures fiscales ne trouvera pas à s’appliquer. 
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« Même si les délais de reprise sont écoulés, les omissions ou insuffisances d’imposition révélées par une procédure judiciaire, par une procédure devant les juridictions administratives ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l’administration des impôts jusqu’à la fin de l’année suivant celle de la décision qui a clos la procédure et, au plus tard, jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. »

Le délai court en cas de contrôle sur demande 

L’article L21B du livre des procédures fiscales permet aux héritiers signataires de la déclaration de succession de demander spontanément à l’administration fiscale d’opérer un contrôle fiscal de la succession

Il s’agit du rescrit successoral.

Pour être recevable, cette demande doit être formée :

  • par les héritiers bénéficiaires d’au moins 1/3 de l’actif net de la succession ;
  • ET dans les trois mois de l’enregistrement de la déclaration. 

Ni l’accord, ni même l’information des autres héritiers ne sont nécessaires. 

Suite à la réception d’une telle requête, l’administration fiscale dispose d’un délai réduit à un an pour exercer son contrôle. Aucun redressement ou reprise ne peut être prononcé postérieurement à ce délai. 

Cependant, ce délai d’un an est susceptible de prorogation dans divers cas : 

  • réponse de la part du redevable : le délai est prorogé du délai de réponse du justiciable ;
  • en cas de biens situés à l’étranger : le délai est prorogé de la durée nécessaire pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères. 

Malgré la requête formée en ce sens, il est également possible que le rescrit successoral soit exclu.

L’article L21B III du livre des procédures fiscales prévoit que le délai réduit est exclu en cas de : 

  • omission de biens dans la déclaration de succession ou non-rappel fiscal d’une donation antérieure ;
  • en cas de non-respect d’une condition nécessaire pour bénéficier du régime de faveur ;
  • aux contribuables passibles de la procédure de l’abus de droit en matière fiscale.

Sont également exclus du rescrit successoral les héritiers n’ayant souscrit une déclaration de succession qu’après mise en demeure de l’administration fiscale ou n’ayant pas réglé les droits de succession en même temps que le dépôt de la déclaration. 

« I. – Les signataires de la déclaration prévue à l’article 800 du code général des impôts et les donataires mentionnés dans un acte de mutation à titre gratuit entre vifs peuvent demander à l’administration de contrôler la déclaration dont ils sont signataires ou l’acte auquel ils sont parties. Cette demande, pour être recevable, doit être signée par les bénéficiaires d’au moins un tiers de l’actif net déclaré et transmis lors de la mutation.

La demande de contrôle doit être :

1° Relative à une déclaration ou un acte enregistré avant la réception d’un avis de mise en recouvrement ou de la mise en demeure mentionnée à l’article L. 67 ;

2° Et présentée au plus tard dans le délai de trois mois suivant l’enregistrement de la déclaration ou de l’acte sans pouvoir être antérieure à la date de cet enregistrement.

II. – Lorsque les conditions mentionnées au I sont satisfaites, aucun rehaussement d’imposition ne peut être proposé postérieurement au délai d’un an suivant la date de réception de la demande de contrôle. Cette période d’un an est prorogée, le cas échéant, du délai de réponse du contribuable aux demandes de renseignements, justifications ou éclaircissements de l’administration, pour la partie excédant le délai prévu à l’article L. 11, ainsi que du délai nécessaire à l’administration pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères lorsque des biens situés à l’étranger figurent sur la déclaration ou l’acte mentionné au I du présent article.

III. – La garantie mentionnée au II ne s’applique pas aux rehaussements d’imposition :

1° Découlant de l’omission, dans l’acte ou la déclaration, de la mention de biens, droits, valeurs ou donations antérieures qui auraient dû y figurer ;

2° Ou procédant de la remise en cause d’une exonération ou d’un régime de taxation favorable en raison du non-respect d’un engagement ou d’une condition prévus pour en bénéficier ;

3° Ou proposés dans le cadre de la procédure prévue à l’article L. 64. »

Quelles sont les conséquences d’un contrôle fiscal ?

Avant d’effectuer un redressement fiscal, l’administration fiscale est tenue d’informer l’héritier déclarant de son intention et de lui proposer, de manière amiable, une rectification. Cette procédure est contradictoire. L’héritier peut soit accepter cette proposition et s’acquitter des droits demandés par l’administration, soit formuler des observations (sous 30 jours). 

Si l’administration fiscale et l’héritier parviennent à un accord, l’héritier s’acquitte des droits de succession et l’affaire est close. 

En savoir plus sur les droits de succession

Cependant, en cas de désaccord persistant, l’administration ouvre une procédure de redressement fiscal et corrige d’elle-même l’impôt dû. 

Les pénalités de retard, majorations et réévaluation à la hausse des biens successoraux sont alors autant de possibilités offertes à l’administration. 

Quels recours sont ouverts en cas de redressement fiscal ? 

Deux types de recours sont ouverts aux redevables en cas de redressement fiscal :

  • le recours gracieux ;
  • le recours contentieux.

Le recours gracieux

Le recours gracieux est à adresser directement à l’administration fiscale et a pour objet de solliciter de sa part une certaine bienveillance quant aux pénalités de retard, majorations et toute mesure prise par l’administration pour sanctionner le redevable. 

Le recours contentieux

Le recours contentieux a pour objet de contester le bien-fondé de l’impôt ou son évaluation. Il se déroule en plusieurs étapes. 

La réclamation préalable

En premier lieu, il est nécessaire de former, par écrit ou en ligne, une réclamation préalable devant le service des impôts concerné. Celle-ci doit être présentée avant le 31 décembre de la seconde année suivant le versement des droits de succession. Elle doit être accompagnée de toutes les pièces permettant de justifier la réclamation. 

L’administration fiscale dispose alors d’un délai de 6 mois, à compter de la présentation de la déclaration, pour rendre sa décision. Si elle est favorable au redevable, l’administration prononce des dégrèvements. Si la décision emporte un rejet total ou partiel, elle doit être motivée. À défaut de réponse dans le délai de six mois, l’administration est réputée avoir rejeté la réclamation. 

Le redevable doit alors saisir les tribunaux avec le concours d’un avocat.

La saisine des tribunaux

En matière de droits de succession, le litige opposant l’administration fiscale et le redevable doit être porté devant les juridictions de l’ordre judiciaire (tribunal judiciaire). 

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Publié le 16 Sep 2022