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Succession
L’existence d’une créance d’assistance pour l’enfant ayant aidée ses parents
Liquidation et partage d’indivisions mobilières et immobilières- Lorsqu’un enfant assiste un parent dans le besoin, il bénéficie d’un recours contre ses co-héritiers s’il rapport la preuve d’un excès de contribution.
- Lorsqu’un enfant assiste un parent qui n’est pas nécessairement dans le besoin, il a un recours en indemnisation contre la succession de ce dernier sur le fondement de l’enrichissement injustifié.
Lorsque certains enfants seulement ont pris soin de leur père ou mère et subvenu à ses dépenses, nos avocats spécialisés en droit des successions sont parfois interrogés sur la possibilité de réclamer une créance contre sa succession.
Pour cela il convient de distinguer deux situations :
- le parent aidé était effectivement dans un état de besoin,
- le parent aidé n’était pas dans un état de besoin.
Le soutien apporté à un parent dans le besoin et l’obligation alimentaire
L’article 205 du code civil dispose que « les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. ».
Un parent est considéré dans le besoin lorsqu’il est dénué de ressource suffisante pour subvenir à ses besoins.
L’aide apportée est l’exécution d’une obligation alimentaire. L’enfant qui l’a assumée ne peut en demander le remboursement à ses parents ni s’en faire indemniser dans le règlement de leur succession.
La jurisprudence a toutefois admis que la personne tenue, en vertu de l’article 205 du code civil, à une obligation alimentaire dispose d’un recours contre ses coobligés pour les sommes qu’elle a payées, excédant sa part contributive, compte tenu des facultés respectives des débiteurs. (Civ. 1re, 20 mai 1974, D. 1975.482, note Magnin). Cette action est ouverte du vivant des parents mais aussi postérieurement à leur décès (Cass civ 1ère 20 mai 1974).
Il ne s’agit pas en ce cas de dette successorale, mais d’une dette personnelle des défendeurs contre ses cohéritiers.
Le soutien apporté en dehors de l’obligation alimentaire et l’action en enrichissement injustifiée
Lorsqu’un enfant apporte son soutien financier à un parent qui n’est pas dans le besoin, ce soutien ne relève donc pas de l’obligation alimentaire de l’article 205 du code civil mais d’un devoir moral que l’enfant s’impose à lui-même.
Les avocats spécialisés en droit des successions du cabinet recherchent donc fréquemment pour nos clients la possibilité pour cet enfant de faire valoir contre la succession des parents, une créance d’indemnisation des frais et dépenses, voire des peines et soins de l’enfant qui s’est ainsi dévoué.
La jurisprudence a longtemps dénié l’existence de toute dette successorale au titre de cette aide, librement apportée par un enfant à son parent.
Pour justifier le refus de toute réclamation d’une indemnité contre la succession, a notamment été invoquée :
- l’intention libérale de celui qui a fourni aide à son parent,
- l’exécution spontanée sur la base d’un devoir moral de sorte que ses agissements et les frais engagés ne sont pas sans cause,
- le caractère non monnayable des prestations de soins et d’assistance,
Plusieurs auteurs ont contesté ces raisonnements estimant que l’équité exige que l’enfant dévoué reçoive un dédommagement.
La jurisprudence a fini par admettre que le devoir moral d’un enfant envers ses parents n’exclut pas que l’enfant puisse obtenir indemnité pour l’aide et l’assistance apportées, dans la mesure où, ayant excédé les exigences de la piété filiale, les prestations librement fournies ont réalisé à la fois :
- un appauvrissement pour l’enfant,
- et un enrichissement corrélatif des parents,
faisant ainsi application de la théorie de l’enrichissement injustifié (Civ. 1re, 12 juill. 1994, no 92-18.639)
Dans la situation tranchée en 1994 par la cour de cassation, un des enfants demandait à être indemnisé pour le temps et les soins consacrés à ses vieux parents, auxquels il avait évité d’être placé dans une maison de retraite et auxquels il avait apporté une assistance constante pour laquelle il avait même sacrifié son avenir professionnel.
Par Sophie Rieussec, le 10 mai 2023
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