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Famille

Plan d’épargne retraite (PER) et communauté légale

Unions (mariage / pacs / concubinage)

Le PER est un bien propre, y compris lorsqu’il a été constitué à l’aide de fonds communs.
La communauté dispose d’un droit à récompense, sauf en cas de rente réversible sur la tête du conjoint survivant.

Définition

Le plan épargne retraite (PER) est un produit financier dont l’objectif est la constitution d’une retraite complémentaire (facultative ou obligatoire). 

Le PER a remplacé l’ensemble des produits financiers ayant cette finalité : PERP (plan épargne populaire, contrats « Madeline », PERCO (plan épargne pour la retraite collectif) ne peuvent plus être souscrits mais peuvent continuer d’être alimentés. 

Les PER se divisent en trois catégories :

  • le PER individuel (pouvant être souscrit par toute personne) ;
  • le PER d’entreprise collectif ;
  • le PER d’entreprise obligatoire.

Fonctionnement

Le contrat comprend deux phases :

  • une première phase d’épargne au cours de laquelle le souscripteur verse des primes sur le contrat ;
  • une seconde phase qui s’ouvre à la date de la liquidation de ses droits à la retraite : le PER se dénoue. Le souscripteur peut alors disposer soit d’un capital soit d’une rente viagère

Pour bénéficier d’une rente viagère, il faut opter dès la souscription du contrat pour cette modalité ou bénéficier d’un PER d’entreprise obligatoire (PERCO). 

Des cas de sortie anticipée sont envisagés mais limités (par exemple : décès du conjoint ou du partenaire). 

En ce qui concerne le régime fiscal du PER, le souscripteur :

  • dispose de la possibilité de déduire de son revenu imposable les versements volontaires (il ne peut pas déduire les versements obligatoires qui concernent uniquement les PER d’entreprise) : dans ce cas, la rente ou le capital versé sera imposé en totalité lors du dénouement ;
  • peut décider de ne pas déduire les versements de son revenu imposable. Lors du dénouement du PER, il bénéficiera d’une fiscalité atténuée. 

Divorce d’époux mariés sous le régime de la communauté légale et sort du PER non débloqué

Dans le cadre d’époux mariés sous le régime de la communauté légale réduite aux acquêts, il est fréquent qu’un époux alimente son PER avec ses salaires qui sont des biens communs.

Nature propre du PER

Quand bien même un PER aurait été alimenté à l’aide de fonds communs, la jurisprudence décide qu’il s’agit d’un bien dont la titularité est propre (Cass. 1re civ., 30 avr. 2014, n° 12-21484).

Le PER répond donc à un régime différent du contrat d’assurance-vie non dénoué. L’avocat spécialisé en divorce devra donc prêter attention car le solde doit figurer à l’actif de la communauté dès lors qu’il a été souscrit à l’aide de deniers communs (cf. Cass. 1re civ., 31 mars 1992, n° 90-16.343 dite jurisprudence « Praslicka »). La différence de régime entre ces deux types de contrat peut s’expliquer par le caractère rachetable du contrat d’assurance-vie contrairement au PER.

Récompenses

Sur le principe d’une récompense

La question d’une récompense due pour le financement d’un PER par des deniers communs n’est pas simple. 

La Cour de cassation considère habituellement que la rente constituée et délivrable lors de la retraite du souscripteur ne génère pas de récompense si elle est réversible sur la tête du conjoint. En l’absence d’une telle réversion, une récompense serait alors due. 

La Cour de cassation se fonde sur une lecture combinée des articles 1404 (alinéa 1er) et 1973 (alinéa 3) du Code civil.

Forment des propres par leur nature, quand même ils auraient été acquis pendant le mariage, les vêtements et linges à l’usage personnel de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles, et, plus généralement, tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne.

Forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s’il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l’un des époux, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté.

« Elle peut être constituée au profit d’un tiers, quoique le prix en soit fourni par une autre personne.

Dans ce dernier cas, quoiqu’elle ait les caractères d’une libéralité, elle n’est point assujettie aux formes requises pour les donations ; sauf les cas de réduction et de nullité énoncés dans l’article 1970.

Lorsque, constituée par des époux ou l’un d’eux, la rente est stipulée réversible au profit du conjoint survivant, la clause de réversibilité peut avoir les caractères d’une libéralité ou ceux d’un acte à titre onéreux. Dans ce dernier cas, la récompense ou l’indemnité due par le bénéficiaire de la réversion à la communauté ou à la succession du prédécédé est égale à la valeur de la réversion de la rente. Sauf volonté contraire des époux, la réversion est présumée avoir été consentie à titre gratuit. »

La Cour de cassation est toutefois venue complexifier ce sujet en considérant qu’aucune récompense n’est due dans l’hypothèse où la réversion est prévue mais qu’elle demeure librement révocable par le souscripteur (Cass. 1re civ., 1er février 2017, n° 16-11599).

La doctrine reste partagée sur ce sujet. En effet, dans cette configuration, si le souscripteur opte pour la rente, il pourra décider de son caractère réversible ou non. Elle considère en conséquence qu’une récompense s’impose nécessairement – si le PER a été financé par des fonds communs – dans la mesure où le souscripteur décide des modalités de déblocage à sa retraite. 

Sur l’évaluation de la récompense

Le financement du PER correspond à une dépense d’acquisition. En conséquence et conformément à l’article 1469 du Code civil, la récompense est égale au montant le plus faible entre la dépense faite et le profit subsistant, sans être moindre que le profit subsistant.

En pratique, la récompense correspondra à la valeur de rachat du PER. 

La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant.

Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.

Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l’aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.

Conséquences de la dissolution du régime matrimonial sur la rente ou le capital d’un PER débloqué

Sortie en capital

Lorsque la dissolution du mariage intervient après que le PER ait été débloqué sous la forme d’un capital, ce dernier doit être traité comme un bien propre du souscripteur. 

Une telle analyse s’explique par la nature propre du contrat, le capital n’étant que le prolongement de celui-ci. Cela est conforme à l’article 1406 (alinéa 2) du Code civil « forment aussi des propres, par l’effet de la subrogation réelle, les créances et indemnités qui remplacent des propres ».

Lorsque le capital a été obtenu grâce à des versements communs, la communauté a droit à une récompense qui s’évalue par rapport au profit subsistant (en pratique, elle correspond au montant des capitaux versés réévalués). 

Là encore, le PER marque sa différence avec le contrat d’assurance-vie pour lequel les capitaux reçus sont des biens communs lorsque le souscripteur exerce son droit de rachat. 

Sortie en rente viagère

Lorsque la dissolution du mariage intervient après le déblocage du PER en rente viagère, celle-ci reste un bien propre. 

Certains auteurs se sont interrogés : la rente ne constituerait-elle pas un revenu de bien propre qui serait donc commun ? La position majoritaire semble toutefois considérer que la rente viagère – fractions du capital – doit être considérée comme un bien propre. 

Il faut alors réfléchir au droit à récompense. Il dépend du caractère réversible ou non de la rente (sachant que le caractère réversible d’une rente a pour effet de diminuer le montant de la rente) : 

  • en cas de rente réversible : aucun droit à récompense n’existe.
  • en l’absence de réversion : la communauté a droit à une récompense pour les rentes qui seront servis au titulaire après la dissolution du mariage. Pour les rentes perçues par le titulaire avant la dissolution, dans la mesure où elles sont considérées comme des fractions de propres (et pas comme des fruits), la communauté doit une récompense puisqu’elle a profité de fonds propres.

Par Victoire Thivend et Capucine Bohuon, le 27 mars 2023

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