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Droit de la famille

Liquidation de PACS : remboursement d'un emprunt par un partenaire sur ses derniers personnels

Cass. civ. 1ère, 5 avr. 2023, n°23-70.007

Unions (mariage / pacs / concubinage), Liquidation et partage d’indivisions mobilières et immobilières, Liquidation et partage de successions

Enseignement de l'arrêt

  • Le remboursement anticipé de l’emprunt indivis constitue une dépense de conservation couverte par l’article 815-13 du code civil à l’inverse des dépenses d’acquisition.
  • Les dépenses d’acquisition se cantonnent à celles qui permettent le transfert de propriété au moment de l’acquisition, à savoir aux apports des acquéreurs.

 

Rappel du contexte de la décision

Aux termes d’un arrêt en date du 5 avril 2023, la Cour de cassation revient sur la question de savoir si un partenaire, qui rembourse sur ses deniers personnels un emprunt indivis, peut revendiquer une créance contre son partenaire.

La Cour de cassation s’interroge sur la nature de la dépense, conservation ou acquisition, dans la perspective de l’application de l’article 815-13 du code civil qui dispose que :

« Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés. » 

Positions jurisprudentielles passées sur l’interprétation de l’article 815-13 du code civil

A l’occasion de l’arrêt étudié, la Cour de cassation rappelle que la jurisprudence a déjà eu l’occasion de préciser : 

  • que l’apport personnel aux fins d’acquisition d’un bien indivis constituait une dépense d’acquisition pour laquelle l’application de l’article 815-13 du code civil est exclu (Cass civ 1ère 26 mai 2021 n°19-21.302),
  • que le remboursement, par l’un des partenaires, des échéances du prêt souscrit pour le financement d’un bien indivis était constitutif d’une dépense conservatoire au sens de l’article 815-13 du code civil (Cass civ 1ère 7 juin 2006 n°04-11.524).

Aussi, il faut distinguer :

  • l’apport du partenaire au moment de l’acquisition : cette dépense n’entre pas dans le cadre de l’article 815-13 du code civil et ne bénéficie pas de sa revalorisation,
  • du remboursement de l’emprunt en cour d’indivision, qui est revalorisé selon la règle de l’article 815-13 du code civil.

Il faut préciser que la jurisprudence habituelle distingue en outre deux dépenses concernant la contribution aux charges du ménage. En effet :

  • le remboursement mensuel de l’emprunt est susceptible de constituer une dépense relative aux charges du ménage, neutralisant toute créance entre partenaires, 
  • l’apport en capital au moment de l’acquisition ne constitue pas une charge du ménage et peut donner lieu à créances entre partenaires.

Décision de la Cour de cassation : le remboursement anticipé de l’emprunt est une dépense de conservation

La Cour de cassation considère dans son avis que le remboursement anticipé de l’emprunt immobilier sur un bien indivis détenu par des partenaires de Pacs est une dépense de conservation.

Le critère de distinction semble être de plus en plus ancré dans l’appréciation du moment de l’engagement de la dépense :  

  • Si elle a lieu avant l’acquisition : il s’agit d’une dépense d’acquisition, 
  • Si elle a lieu après l’acquisition : il s’agit d’une dépense de conservation.

Pour la Cour de cassation la dépense d’acquisition se résume au paiement du prix pour obtenir le transfert de propriété au moment de l’acquisition, ce que ne constitue pas le remboursement anticipé de l’emprunt. 

L’exclusion des dépenses d’acquisition de l’article 815-13 du code civil est une application rigoriste mais valable de l’opération juridique d’acquisition : avant le transfert de propriété, l’indivision n’existe pas et donc l’article 815-13 du code civil n’est pas applicable puisqu’il n’a vocation à régir que les indivisions. A l’inverse, le même article devient applicable dès après l’acquisition.

Moyens pour un partenaire de faire obstacle à une demande de créance sur le fondement de l’article 815-13 du code civil

On peut se demander si pour faire obstacle à une telle créance le partenaire débiteur peut invoquer la contribution aux charges du ménage.

La Cour de cassation a en effet déjà retenu l’existence de convention tacite entre partenaires de « contribution aux charges de la vie courante » empêchant ces derniers de faire des comptes entre eux concernant lesdites dépenses comme le financement de leur résidence principale. Cette jurisprudence se base sur l’obligation d’aide matérielle qui existe entre partenaires.

Par analogie aux couples mariés, il est possible de considérer que le remboursement anticipé d’un emprunt, au cours du Pacs, ne participe de la contribution aux charges du ménage même si le bien financé constitue un logement à destination familiale dans la mesure où il s’agit d’un remboursement en capital et dans une mesure où le montant ne laisse pas de doutes sur ce point.

Toutefois, la jurisprudence ne s’est jamais prononcée à ce sujet concernant les Pacs puisqu’elle n’a traité que la question de l’apport en capital d’époux séparés de biens.

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