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Procédure

Procédure civile, irrecevabilité d'office et conclusions

Cass. Soc., 18 oct. 2023, n°22-18.385

Procédure et pratiques professionnelles

Enseignement de l'arrêt

Les moyens nouveaux invoqués post clôture de la mise en état devant la Cour de cassation sont par principe irrecevables.

Le rappel d’une solution classique : l’irrecevabilité de conclusions signifiées postérieurement à la clôture

Les faits de l’espèce sont liés au droit du travail mais la leçon procédure la à en tirer est hautement applicable aux matières exercées par notre cabinet, raison du développement des présentes explications.

Un litige oppose une société à responsabilité limitée et un employé. La société a licencié le défendeur à la cassation pour faute grave le 28 septembre 2018. Le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail. Un appel est interjeté par la société. La Cour d’appel de Grenoble rend sa décision le 3 mai 2022. 

Les juges du fond ont considéré que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et ont condamné la société à verser à l’employé diverses sommes : paiement de la mise à pied, congés payés afférents, l’indemnité compensatrice de préavis, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse etc…

La société forme un pourvoi en cassation et motive sa demande sur le fondement de l’article 793 devenu 802 du Code de procédure civile qui dispose que : « Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office »

Or, la Cour d’appel pour statuer sur le litige a visé les conclusions de l’employé notifiées le 2 décembre 2021. Cependant, l’ordonnance de clôture avait été prononcée le 23 mars 2021. La cour d’appel n’a pas relevé d’office l’irrecevabilité des conclusions déposées postérieurement à la clôture.  

La Cour de cassation casse et annule la décision de la Cour d’appel de Grenoble en date du 3 mai 2022. 

La solution n’a rien de réellement nouveau. La Cour de cassation ne fait que réaffirmer de manière stricte le principe posé par l’article 802 du code de procédure civile : « Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office ».

L’arrêt étudié est plutôt intéressant dans l’analyse de l’argumentation utilisée pour y parvenir.

L’apport de l’arrêt : le traitement des arguments nouveaux devant la Cour de cassation

Le défendeur à la cassation soutient que le moyen invoqué par la société n’a pas été invoqué devant la Cour d’appel alors qu’elle était en mesure de le faire (pour rappel, selon l’article 619 du Code de procédure civile les moyens nouveaux ne sont pas recevables devant la Cour de cassation). 

La Cour de cassation répond que le moyen tiré de ce que la Cour d’appel n’a pas soulevé d’office l’irrecevabilité d’office les conclusions de l’intimé est né de l’arrêt rendu le 3 mai 2022 et qu’il ne pouvait donc pas être invoqué au cours de la procédure d’appel. Par conséquent, la Cour de cassation juge que le moyen soulevé par le demandeur à la cassation est recevable. 

La Haute Cour casse et annule ainsi en toutes ses dispositions l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Grenoble le 3 mai 2022, en considérant que les juges du fond ont fondé leur décision sur des conclusions signifiées post clôture de la mise en état alors même qu’ils auraient dû prononcer l’irrecevabilité d’office desdites écritures sans qu’il ne soit nécessaire que l’irrecevabilité soit invoquée par les parties à l’instance. 

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