Jurisprudences
Partage et tirage au sort - À défaut d’entente entre les copartageants les lots doivent être tirés au sort
Cass. civ. 1ere, 21 mai 2025, RG n°23-18.900
Liquidation et partage d’indivisions mobilières et immobilières, Liquidation et partage de régime matrimonial
Enseignement de l'arrêt
L’attribution préférentielle d’un bien immobilier dans le cadre d’un partage répond à des conditions strictes énumérées par la loi. A défaut d’accord et de respect de ces conditions, il sera impérativement procédé au tirage au sort des biens.
A défaut d’accord entre les copartageants, il n’y a pas lieu de rechercher les considérations personnelles permettant les meilleures attributions mais de procéder impérativement à un tirage au sort.
Rappel du cadre légal
L’attribution préférentielle permet de recevoir un bien indivis en priorité lors d’un partage. Ce mécanisme vise à préserver des biens importants pour l’exploitation ou la vie personnelle du bénéficiaire.
L’attribution préférentielle répond à plusieurs conditions :
- elle doit être demandée par le conjoint survivant ou l’héritier copropriétaire,
- le demandeur doit justifier d’un lien juridique directe et personnel avec le bien (propriété indivise, vocation successorale, etc.)
- le demandeur à l’attribution préférentielle doit démontrer qu’il a établi sa résidence principale dans ledit bien (lorsqu’il s’agit d’un bien immobilier) ou qu’il exploite le bien (lorsqu’il s’agit d’exploitation agricole);
- il doit disposer des capacités financières pour payer la soulte due en contrepartie de cette attribution. Ce denier critère n’est pas une exigence de recevabilité de la demande d’attribution préférentielle dans le Code civil, mais un élément d’appréciation pour le juge,
Toutefois, lorsqu’il n’existe pas d’accord entre les copartageants et que les conditions précédemment citées ne sont pas respectées, seul un tirage au sort des biens est possible en application des dispositions de l’article 826 du Code civil.
C’est ce qui est rappelé par la Cour de cassation par son arrêt du 21 mai 2025.
« L’égalité dans le partage est une égalité en valeur.
Chaque copartageant reçoit des biens pour une valeur égale à celle de ses droits dans l’indivision.
S’il y a lieu à tirage au sort, il est constitué autant de lots qu’il est nécessaire.
Si la consistance de la masse ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte ».
Faits et procédure
Décision de la cour d’appel
Une femme consent à sa fille et ses petites filles (lesquelles viennent en représentation de leur mère prédécédée), par donation la nue-propriété indivise d’un appartement et d’un parking.
Un litige survient dans le cadre du partage de cette indivision.
La cour d’appel est saisie du litige et homologue le projet d’acte liquidatif établi par le Notaire. Pour homologuer ce projet qui prévoyait l’attribution du bien donné à la fille du donateur, la Cour d’appel retient que les autres indivisaires :
- ne motivent pas leur demande d’attribution de l’immeuble,
- n’exposent pas les modalités de financement de la soulte dont elles seraient redevables en cas d’attribution à leur profit,
- ne formulent pas de demandes aux fins de tirage
Moyens au pourvoi
Les petites-filles forment un pourvoi en cassation considérant que la Cour d’appel a violé les dispositions de l’article 826 du Code civil en homologuant le projet de partage prévoyant l’attribution du bien. Elles mettent en avant qu’à défaut d’accord entre les copartageants, les lots constitués en vue d’un partage doivent obligatoirement être tirés au sort. En dehors des cas limitativement prévus par la loi, il ne peut être procédé à l’attribution du bien.
La cour d’appel a relevé que les demanderesses au pourvoi ont fait valoir leur volonté de se voir attribuer l’immeuble. De sorte que la Cour d’appel aurait dû constater qu’il n’existait pas d’accord entre les indivisaires concernant le sort de ce bien et que par conséquent le tirage au sort aurait dû être ordonné.
Apport de la Cour de cassation
La Cour de cassation prononce sa décision au visa de l’article 826 du Code civil. Il résulte des dispositions de cet article qu’à défaut d’entente entre les indivisaires dans une indivision (par donation ou succession), les lots constitués en en vue du partage doivent obligatoirement être tirés au sort. En dehors des cas limitativement énumérés par la loi, il ne peut être procédé à des attributions.
La Cour d’appel a constaté que les deux parties demandent l’attribution du bien, pourtant malgré de désaccord elle homologue le projet de partage qui prévoit l’attribution du bien immobilier à la fille du donateur. La Cour d’appel n’a pas suivi ses propres constatations, et a violé les dispositions de l’article précité.
La Cour de cassation par cet arrêt rappelle que l’égalité dans le partage est une égalité en valeur, que chaque copartageant doit recevoir des biens pour une valeur égale à ses droits dans l’indivision. S’il y a lieu à tirage au sort, il doit être constitué autant de lots qu’il est nécessaire. Si la masse indivise ne permet pas de former des lots d’égale valeur, leur inégalité se compense par une soulte.
A défaut d’accord entre les indivisaires les lots en vue du partage doivent être tirés au sort. En dehors des cas prévus par la loi, il ne peut être procédé à des attributions.
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