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Droit du patrimoine

Indivision - Démolition des nouveaux ouvrages édifiés sans le consentement d'un indivisaire

Cass. civ. 3eme, 7 mai 2025, n°24-15027

Liquidation et partage d’indivisions mobilières et immobilières, Liquidation et partage de successions

Enseignement de l'arrêt

L’ouvrage construit sur un terrain faisant l’objet d’une indivision forcée sans le consentement d’un indivisaire doit être démoli.

Rappel du cadre de l’indivision forcée

L’indivision forcée se distingue de l’indivision ordinaire par le fait qu’elle s’impose aux propriétaires, qui ne peuvent y mettre fin librement tant que certaines conditions persistent. 

Il s’agit d’une situation dans laquelle la nature ou la destination d’un bien impose la conservation de l’indivision, souvent en raison de son usage collectif ou de son affectation à des fonds distincts appartenant à plusieurs personnes. Cette indivision est qualifiée de « forcée » car elle ne peut cesser que dans des cas strictement encadrés, généralement avec l’accord unanime des indivisaires ou sous conditions particulières. 

Le partage de biens en indivision forcée ne peut donc intervenir que si tous les indivisaires y consentent expressément. 

L’indivision forcée se caractérise par l’impossibilité de mettre fin à l’indivision par partage, sauf accord unanime des indivisaires. Le juge ne peut ordonner le partage contre la volonté même d’un seul indivisaire, protégeant la destination collective du bien.

Elle peut être perpétuelle, notamment lorsque la destination du bien le commande, et toute cession ou adjudication privative des droits d’un indivisaire est alors prohibée. 

Ainsi la jurisprudence reconnaît le caractère forcé et perpétuel à l’indivision de certains espaces servant à l’usage commun de plusieurs fonds, telle une cour commune, une allée ou un couloir, qui sont des accessoires indispensables à la desserte ou à l’exploitation des fonds voisins.

Faits et procédure

Madame et Monsieur X et la SCI Z font réaliser une rampe d’accès bétonnée permettant un accès plus direct à leurs fonds après surélévation d’un chemin.

Monsieur H les assigne pour obtenir la démolition de l’ouvrage et des aménagements réalisés ainsi que la réfection du chemin et l’indemnisation de ses préjudices. 
La Cour d’appel rejette les demandes de Monsieur H., considérant que Madame et Monsieur X et la SCI Z « n’ont modifié ni l’assiette du chemin ni son usage, dès lors qu’il a toujours vocation à desservir les fonds, et que la création de la rampe bétonnée ne prive pas Monsieur H de l’accès à sa propriété ni ne le diminue, comme elle ne l’empêche pas d’emprunter la partie du chemin sur laquelle la rampe a été construite ».

Apport de la Cour de cassation

La Cour de cassation – en citant les articles 544 et 551 du Code civil – rappelle que, si en matière d’indivision forcée chacun des indivisaires a le droit d’user et de jouir du bien indivis (à la condition de ne pas en changer la destination sans le consentement unanime de tous les copropriétaires et de ne causer ni dommage ni trouble à la possession d’aucun d’eux) chacun d’eux peut, en vertu de son droit propre, demander la suppression totale des nouveaux ouvrages édifiés sans son consentement sur le fonds indivis, ne pouvant être contraint d’en devenir propriétaire.

« Le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par la loi ».

« Tout ce qui s’unit et s’incorpore à la chose appartient au propriétaire, suivant les règles qui seront ci-après établies ».

La Cour de cassation casse et annule l’arrêt d’appel car la rampe a été édifiée sur une parcelle en indivision forcée, sans que Monsieur H y ait consenti.

L’indivision forcée est un régime exceptionnel face au principe de liberté de sortie de l’indivision. Elle vise à préserver certains biens d’un démembrement susceptible de nuire à leur affectation ou à l’intérêt collectif et est donc réservé à des cas très précis.

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