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Droit de la famille

Divorce - Valorisation d’un bien professionnel sous le régime de la participation aux acquêts

Cass. civ. 1ere, 13 déc. 2024, n°21-25.554

Liquidation et partage de successions, Divorce – Séparation de corps

Enseignement de l'arrêt

Pour valoriser un bien professionnel dans le patrimoine final il conviendrait prendre en compte son état au jour de la dissolution du régime et non celui au jour du mariage.

Rappel sur le fonctionnement du régime de la participation aux acquêts

Sous le régime de la participation aux acquêts, chaque époux conserve l’administration et la disposition de ses biens personnels pendant le mariage, y compris les biens professionnels. 

Toutefois, à la dissolution du régime matrimonial (divorce ou succession), un rééquilibrage patrimonial a lieu pour déterminer les acquêts nets de chaque époux, réalisés durant le mariage (c’est-à-dire son enrichissement personnel). Ce rééquilibrage s’opère par le paiement d’une créance de participation due par l’époux qui s’est le plus enrichi pendant le mariage.

Le montant de cette créance est déterminé par la différence entre le patrimoine originaire et le patrimoine final de chacun des époux. 

Un bien professionnel appartenant à l’un des époux peut ainsi intégrer le calcul de la créance de participation si son état ou sa valeur évolue de manière significative pendant le mariage

Cette évolution peut résulter d’améliorations apportées par l’industrie personnelle de l’époux concerné.

Rappel du contexte de l’affaire

Dans l’arrêt de la Cour de cassation du 13 décembre 2023 une épouse pharmacienne, propriétaire de son officine avant le mariage, souhaite échapper à l’inclusion de cette plus-value dans la créance de participation en valorisant le bien de la même façon dans le patrimoine final et dans le patrimoine originaire (ce qui ne génère aucune différence et exclut donc de facto l’entreprise de la créance de participation).

La Cour d’appel fait droit à sa demande et valorise l’officine de la même façon dans le patrimoine originaire et final.

Son conjoint prétend à l’inverse que la plus-value entre dans le calcul de la créance de participation. Il forme un pourvoi en cassation contre l’arrêt d’appel.

Décision de la Cour de cassation

Dans son arrêt du 31 décembre 2023, la Cour de cassation juge : « « Lorsque l’état d’un bien a été amélioré, fût-ce par l’industrie personnelle d’un époux, il doit être estimé […] dans le patrimoine final, selon son état à la date de dissolution du régime, en tenant compte des améliorations apportées, la plus-value ainsi mesurée venant accroître les acquêts nets de l’époux propriétaire. »

Il en résulte que lorsque l’état d’un bien s’est amélioré au cours du mariage, notamment par l’industrie personnelle d’un époux, il doit être évalué :

  • dans son état initial pour le patrimoine originaire,
  • dans son état à la date de la dissolution dans le patrimoine final, 
  • dans les deux cas pour sa valeur à la date de la liquidation du régime matrimonial 

La plus-value ainsi mesurée accroît les acquêts nets de l’époux propriétaire. 

Cet arrêt applique très rigoureusement 

  • l’article 1574 du code civil qui prévoit que les biens du patrimoine final doivent être évalués selon leur état au jour de la dissolution du régime pour leur valeur au jour de la liquidation.
  • l’article 1671 du code civil qui prévoit que les biens du patrimoine originaire doivent être évalués selon leur état au jour du mariage d’après leur valeur au jour de la liquidation du régime matrimonial.

Article 1671 du code civil 

« Les biens originaires sont estimés d’après leur état au jour du mariage ou de l’acquisition, et d’après leur valeur au jour où le régime matrimonial est liquidé. S’ils ont été aliénés, on retient leur valeur au jour de l’aliénation. Si de nouveaux biens ont été subrogés aux biens aliénés, on prend en considération la valeur de ces nouveaux biens.

De l’actif originaire sont déduites les dettes dont il se trouvait grevé, réévaluées, s’il y a lieu, selon les règles de l’article 1469, troisième alinéa. Si le passif excède l’actif, cet excédent est fictivement réuni au patrimoine final. »

Article 1574 Code civil : 

« Les biens existants sont estimés d’après leur état à l’époque de la dissolution du régime matrimonial et d’après leur valeur au jour de la liquidation de celui-ci. Les biens qui ont été aliénés par donations entre vifs, ou en fraude des droits du conjoint, sont estimés d’après leur état au jour de l’aliénation et la valeur qu’ils auraient eue, s’ils avaient été conservés, au jour de la liquidation.

De l’actif ainsi reconstitué, on déduit toutes les dettes qui n’ont pas encore été acquittées, y compris les sommes qui pourraient être dues au conjoint.

La valeur, au jour de l’aliénation, des améliorations qui avaient été apportées pendant le mariage à des biens originaires donnés par un époux sans le consentement de son conjoint avant la dissolution du régime matrimonial doit être ajoutée au patrimoine final. »

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Publié le 07 Juil 2025

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