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Procédure

Procédure - Les conditions de la recevabilité du second appel

Cass. civ. 2e, 30 avril 2025, pourvoi n° 22-20.064

Procédure

Enseignement de l'arrêt

La seconde déclaration d’appel, transmis par le réseau privé virtuel des avocats (RPVA) dans le délai d’appel et avant le prononcé de l’irrecevabilité du premier est recevable.

Rappel du cadre légal

Droit d’appel

L’article 546 du code de procédure civile pose le principe du droit d’appel en procédure civile. Ce texte consacre l’idée que l’appel, en tant que voie de recours contre un jugement de première instance, n’est ouvert qu’à certaines conditions précises, principalement l’existence d’un intérêt à agir pour la partie concernée, et l’absence de renonciation à ce droit.

« Le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n’y a pas renoncé.

En matière gracieuse, la voie de l’appel est également ouverte aux tiers auxquels le jugement a été notifié. »

Transmission par voie électronique

L’article 930-1 du code de procédure civile pose une règle fondamentale pour la procédure d’appel avec représentation obligatoire.

Il impose l’utilisation exclusive de la voie électronique pour la transmission des actes de procédure à la cour d’appel, sous peine d’irrecevabilité relevée d’office.

« A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. En ce cas, la déclaration d’appel est remise ou adressée au greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l’un est immédiatement restitué.

Lorsque la déclaration d’appel est faite par voie postale, le greffe enregistre l’acte à la date figurant sur le cachet du bureau d’émission et adresse à l’appelant un récépissé par tout moyen.

Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l’expéditeur.

Un arrêté du garde des sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique. »

Interdiction de former un nouvel appel

« La partie dont la déclaration d’appel a été frappée de caducité en application des articles 902,906-1,906-2 ou 908 ou dont l’appel a été déclaré irrecevable n’est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie.

De même, n’est plus recevable à former appel principal l’intimé auquel ont été régulièrement notifiées les conclusions de l’appelant et qui n’a pas formé un appel incident ou provoqué contre le jugement attaqué dans les délais impartis aux articles 906-2 et 909 ou dont l’appel incident ou provoqué a été déclaré irrecevable. »

Conformément à l’article 16 du décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023, ces dispositions entrent en vigueur le 1er septembre 2024. Elles sont applicables aux instances d’appel introduites à compter de cette date et aux instances reprises devant la cour d’appel à la suite d’un renvoi après cassation lorsque la juridiction de renvoi est saisie à compter de cette même date.

Cela signifie que si la déclaration d’appel est frappée de caducité ou si l’appel est déclarée irrecevable, l’appelant ne peut plus introduire un nouvel appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie. Cela constitue une extinction définitive de l’instance d’appel à titre principal.

L’intimé, auquel ont été régulièrement notifiées les conclusions de l’appelant, doit impérativement former un appel incident ou provoqué dans les délais des articles 906-2 et 909. À défaut, il perd la possibilité de former ultérieurement un appel principal contre le même jugement, même si le jugement n’a pas été signifié. S’il y a des chefs du jugement défavorables à l’intimé, il doit ainsi utiliser la voie de l’appel incident, sous risque de forclusion.

En résumé, la caducité ou l’irrecevabilité de la déclaration d’appel entraîne la perte définitive du droit d’appel principal contre le même jugement et la même partie, tant pour l’appelant que pour l’intimé qui n’a pas formé appel incident dans les délais.

Faits et procédure

Le 4 décembre 2020, l’appelante relève appel d’un jugement de première instance du tribunal judiciaire de Marseille. La déclaration d’appel n’a pas été formée par voie dématérialisée (RPVA) mais en version papier. 

Quelques jours plus tard, le 18 décembre 2020, elle dépose une seconde déclaration d’appel par le réseau privé virtuel avocats (RPVA), contre le même jugement et la même partie intimée. La deuxième déclaration d’appel a été déposée rapidement, sans que le conseiller de mise en état ait le temps de se prononcer sur l’irrecevabilité de la première déclaration d’appel

Le 30 décembre 2020, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel constate l’irrecevabilité de la première déclaration d’appel.

Le 29 juin 2021, le conseiller de la mise en état saisi par l’intimé déclare l’irrecevabilité de la deuxième déclaration d’appel, faute pour l’appelante de démontrer un intérêt à interjeter appel.

L’appelante défère la deuxième ordonnance du conseiller de la mise en état à la cour. Elle considère qu’un appel irrégulier n’empêche pas de former un second appel avant expiration du délai tant que le premier appel n’a pas été frappé d’irrecevabilité ou de caducité.

Apport de la Cour de cassation

La Cour de cassation était donc amenée à examiner si un second appel peut être recevable, alors qu’un premier appel, entaché d’irrégularité, n’a pas encore été déclaré irrecevable ou caduc.

La Cour de cassation rappelle d’abord les dispositions des articles 546 et 911-1, alinéa 3, du code de procédure civile. 

Selon le premier de ces textes, le droit d’appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n’y a pas renoncé. 

Selon le second article, la partie dont l’appel a été déclaré irrecevable n’est plus recevable à former un appel principal contre le même jugement et à l’égard de la même partie.

La Cour de cassation considère que le premier appel n’ayant pas été transmis par voie dématérialisée était irrégulier. 

Elle considère cependant que cette irrégularité du premier appel laissait ouvert la possibilité d’un second appel sous conditions. Le second appel, transmis par le RPVA dans le délai d’appel (première condition) et avant le prononcé de l’irrecevabilité du premier (deuxième condition), doit donc être déclaré recevable.

C’est à tort que la cour d’appel, sur déféré, prononce l’irrecevabilité de l’appel pour défaut d’intérêt.

La décision de la Cour de cassation doit être saluée dans sa volonté de préserver l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

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