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Procédure

Point sur la réforme de la saisie des rémunérations

Décret n° 2025-125, 12 fév. 2025

Procédure et pratiques professionnelles, Patrimoine - Fiscalité

Enseignement de l'arrêt

La loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 a prévu en son article 47 une réforme de la procédure de la saisie des rémunérations.

La saisie des rémunérations est une mesure d’exécution forcée, prévue par le Code des procédures civiles d’exécution et le Code du travail, qui porte sur les revenus d’activité d’un débiteur salarié. Le créancier qui exerce cette mesure se voit verser directement le salaire de son débiteur en paiement de sa créance.

Rappel de l’ancienne méthodologie : une procédure judiciaire

Historiquement, la saisie des rémunérations nécessitait l’intervention du juge de l’exécution. Il était saisi par requête remise ou adressée au greffe par le créancier, contenant les mentions prescrites aux articles R. 3252-13 du code du travail et 57 du Code de procédure civile.

Cette saisine devait être précédée d’une tentative obligatoire de conciliation en chambre du conseil en vertu de l’ancien article R3252-12 du Code du travail.

En cas d’échec de la conciliation, le juge dressait un procès-verbal de non-conciliation et la saisie pouvait être réalisée après vérification par le juge du montant de la créance en principal, intérêts et frais, et s’il y a lieu, après que le juge ait tranché les contestations soulevées par le débiteur (ancien article 3252-19 al. 3 du code du travail).

Il appartenait ensuite au directeur de greffe du tribunal judiciaire de veiller au bon déroulement des opérations de saisie (ancien article R3252-21 du code du travail).

Le greffier procédait à la saisie des rémunérations en rédigeant l’acte de saisie dans les huit jours, et ce dernier est notifié au tiers saisi par LRAR. Le débiteur est informé par lettre simple. Cette procédure a pris fin le 1er juillet 2025.

Réforme de la procédure de la saisie des rémunérations en vigueur au 1erjuillet 2025

La loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 a prévu en son article 47 une réforme de la procédure de la saisie des rémunérations.

Le décret n° 2025-125 du 12 février 2025 relatif à la nouvelle procédure de saisie des rémunérations a précisé les éléments de cette réforme, dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er juillet 2025.

Les nouveautés de la réforme : une procédure déjudiciarisée

Désormais, le commissaire de justice initie la procédure de saisie des rémunérations par la signification d’un commandement de payer au débiteur. Ainsi, le créancier ne saisit plus le juge de l’exécution par requête, évitant ainsi la tenue d’une audience.

A compter de la signification, le débiteur dispose d’un mois pour :

  • soit payer les sommes dues ;
  • soit trouver un accord avec le créancier ;
  • soit contester la mesure ;

Si aucun accord n’est trouvé entre le créancier et le débiteur un mois après le commandement de payer, avant la signification de l’acte de saisie, le créancier demande à la chambre nationale des commissaires de justice la désignation d’un commissaire de justice répartiteur (nouvel article R212-1-10 du Code des procédures civiles d’exécution).

Ce commissaire de justice, formé spécifiquement au suivi de la procédure de saisie des rémunérations, prend en charge les tâches assumés par les services de greffe avant le 1er juillet 2025.

Il procède donc à la vérification du calcul des quotités, réalise les projets d’état de répartitions, les informations aux créanciers, débiteurs et tiers saisi, et comme son nom l’indique, procède à la répartition des sommes saisies entre le créancier et le débiteur.

Après désignation d’un commissaire de justice répartiteur, le créancier dispose d’un délai de trois mois pour faire signifier son procès-verbal de saisie à l’employeur du débiteur. C’est le créancier, par l’intermédiaire de son commissaire de justice qui signifie la saisie au tiers.

En outre, le décret prévoit la création du registre numérique des saisies des rémunérations. Ce dernier a vocation à répertorier toutes les saisies des rémunérations, obligatoirement inscrites par le commissaire de justice engageant la procédure (article R212-1-2 du Code des procédures civiles d’exécution).

Les éléments conservés de l’ancienne procédure

En raison de la nature alimentaire des sommes saisies, un régime de protection du débiteur est maintenu.

Le calcul des quotités et du minimum insaisissable est conservé, et les règles prévues par le code du travail continuent de s’appliquer (notamment l’article R3252-2 du code du travail).

En outre, la procédure redevient judiciaire en cas de contestation, puisque le débiteur dispose d’un délai d’un mois après la signification du commandement de payer pour contester le fondement de la saisie. 

Cette contestation doit être formée par assignation et portée devant le juge de l’exécution (nouvel article R212-1-9 du code des procédures civiles d’exécution). Cette saisine suspend la mise en œuvre de la procédure de saisie des rémunérations jusqu’à validation ou invalidation du commandement de payer par le juge.

En outre, le débiteur continue de pouvoir saisir le juge de l’exécution à tout moment d’une demande de contrôle de la mise en œuvre de la saisie (calcul des quotités, respect des montants ou des sommes non saisissable…). Cependant, ce recours ne suspend pas la saisie, à la différence de la contestation effectuée dans le mois qui suit la signification du commandement de payer, afin d’éviter les recours dilatoires.

De plus, le juge de l’exécution peut également toujours être saisie par le débiteur qui estime que la mesure de saisie des rémunérations serait inutile ou abusive.

La mise en œuvre de la réforme dans le temps

L’article 6 du décret du 12 février 2025 prévoit les modalités du transfert des procédures de saisie initiées avant le 1er juillet 2025.

La transmission des saisies en cours

S’agissant des saisies de rémunérations en cours, ces dernières seront transmises aux commissaires de justice. La situation sera différente selon que le créancier est assisté par un commissaire de justice ou non :

  • si le créancier est assisté par un commissaire de justice : la procédure lui est transmise directement sans démarche supplémentaire, avec les informations essentielles ;
  • si le créancier n’est pas déjà assisté par un commissaire de justice : la chambre régionale des commissaires de justice reçoit la demande pour désigner un commissaire de justice compétent

Le greffe établit un procès-verbal de transmission en deux exemplaires, l’un conservé par le greffe, l’autre remis au commissaire de justice ou à la chambre régionale des commissaires de justice selon la situation.

Les demandes déposées auprès des tribunaux avant le 1er juillet 2025 mais n’ayant pas fait l’objet d’une saisie des rémunérations auprès du tiers

En présence de contestations et de demandes incidentes sur des procédure de saisie introduites avant le 1er juillet 2025, ces dernières sont transmises au commissaire de justice après que la décision judiciaire soit devenue définitive.

En cas de requête en saisie introduites avant le 1er juillet 2025, cette dernière est transmise au commissaire de justice après la phase de conciliation ou une fois le jugement de saisie devenu définitif.

Enfin, pour les demandes transmises avant le 1er juillet 2025 dont les saisies n’étaient pas en place, elles sont transmises à un commissaire de justice.

Procédure 

Dans ces hypothèses, le créancier doit confirmer sa volonté de poursuivre la procédure auprès du commissaire de justice en charge de la procédure, dans un délai de trois mois à compter de la transmission du dossier.

Cette confirmation est inscrite par le commissaire de justice sur le registre numérique des saisies des rémunérations.

Conformément aux nouveaux principes de la procédure de saisie des rémunérations, un commissaire de justice répartiteur est désigné. Ce dernier prend ensuite contact avec le tiers saisi pour reprendre les versements.